Jazz libre : « musique-action » ou la recherche d’une praxis révolutionnaire au Québec (1967-1975)
Published 2016-04-11
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Abstract
Fondé en 1967, le Jazz libre se démarque dans le paysage culturel du Québec par sa quête d’une praxis révolutionnaire dont la visée est de promouvoir la démocratie culturelle dans les milieux ouvriers. Durant ses huit années d’existence, ce groupe d’improvisateurs tisse des liens non négligeables avec le Conseil central des syndicats nationaux de Montréal, le Front de libération du Québec et le Front de libération des femmes. Les membres de ce collectif s’approprient le free jazz – une musique rattachée au nationalisme noir – afin de situer leur projet d’un Québec socialiste et indépendant dans un processus historique marqué par la décolonisation. Cette appropriation exprime un désir de concrétiser un rapprochement entre l’individu québécois colonisé – celui que Pierre Vallières qualifie de « nègre blanc d’Amérique » – et son homologue afro-américain. Elle repose sur la conviction que l’improvisation en musique est un vecteur de communication, d’organisation et de participation. La présente étude interroge le discours politico-culturel sur lequel la « musique-action » du Jazz libre repose. Elle propose une analyse élargie de la place occupée par le free jazz dans les mouvements de résistance au pouvoir tout en mettant en relief le volet culturel du militantisme politique déployé au Québec durant les années 1960 et 1970.
Founded in 1967, Free Jazz stands in the cultural landscape of Quebec by its quest for a revolutionary praxis which aims to promote cultural democracy among workers. During its eight years of existence, this group of improvisers weaves significant links with the Montreal Council of the Confederation of National Trade Unions, the Quebec Liberation Front and the Women’s Liberation Front. Members of this group appropriated Free Jazz – a music attached to black nationalism – in order to insert their project of a socialist and independent Quebec in a historical process marked by decolonization. This appropriation expressed a desire to achieve a rapprochement between the colonized individual Quebecker – Pierre Vallières, whom one calls “white negro in America” – and his African-American counterpart. It was based on the belief that musical improvisation is a vehicle for communication, organization and participation. This study questions the political and cultural discourse on which the “music-action” of Free Jazz was based. It offers a broader analysis of the place of Free Jazz in resistance movements while highlighting the cultural aspect of political activism in Quebec during the 1960s and 1070s.