Labour / Le Travail
Issue 92 (2023)

From Other Shores / Des nouvelles venues d’ailleurs

Prendre soin de la famille émancipée. La santé des affranchis et sa négociation à l’aube de la Reconstruction au Tennessee (1862–1866)

Nelson Ouellet, Université de Moncton

Résumé : Dans cet article, les contrats de travail signés au Tennessee par les propriétaires fonciers et les affranchis sont placés au centre d’une étude sur un paradoxe de la liberté aux États-Unis. Nous soutenons l’idée que la santé des affranchis – qui comprend les soins médicaux, la subsistance et la protection physique – se négocie durant et après la guerre de Sécession dans le but d’assujettir les intérêts des Noirs, de l’État et des propriétaires terriens à un idéal de relations sociales de production régi par la liberté, le droit et le marché. En examinant les contrats de travail et leurs clauses médicales, nous revisitons l’approche médico-politique qui a maintes fois conduit les historiens à la thèse de l’échec de la Reconstruction. Nous plaçons aussi la famille noire dans le processus d’émancipation et de production par la voie des contrats et d’une relecture de la « culture de la dissimulation » proposée par l’historienne Darlene Clark Hine il y a plus de trente ans. Enfin, nous nous éloignons d’une lecture qui réduit les contrats à la seule oppression dont étaient victimes les Noirs après la guerre de Sécession. En complément, nous invitons le lecteur à examiner les débats sur la citoyenneté qui ont suivi la ratification du treizième amendement.

Mots clefs : émancipation, Reconstruction, contrats, travail, santé, famille, Noirs

Abstract: This article places the labor contracts signed in Tennessee by landowners and freedmen at the center of a study of a paradox of freedom in the United States. The text argues that freedmen’s health – which included medical care, sustenance, and physical protection – was negotiated during and after the Civil War with the goal of subjugating the interests of blacks, the state, and landowners to an ideal of social relations of production governed by freedom, law, and the market. Through an examination of labor contracts and their medical clauses, the article revisits the medical-political approach that has repeatedly led historians to the failure of Reconstruction. It also places the black family in the process of emancipation and production through contracts and a rereading of the “culture of dissemblance” proposed by historian Darlene Clark Hine over thirty years ago. Finally, the article moves away from a reading that reduces contracts to the oppression blacks faced after the Civil War. As additional input, the article invites an examination of the debates over citizenship that followed the ratification of the Thirteenth Amendment.

Keywords: freedom, Reconstruction, contracts, work, health, family, African Americans

Dans cet article, nous examinons les origines d’un paradoxe de la liberté aux États-Unis en tentant de répondre à deux questions : Pourquoi le gouvernement fédéral, par l’entremise de son Bureau des affranchis, juge-t-il bon d’insérer des clauses de subsistance et de soins dans les contrats de travail proposés aux signataires émancipés à l’hiver 1865–1866?1 Pourquoi les promoteurs de l’idéologie républicaine, défenseurs d’une acception stricte de la liberté, acceptent-ils d’asseoir les relations sociales de production sur un modèle de rémunération paternaliste après l’adoption, la ratification et la certification du treizième amendement?2 La réponse à ces questions se trouvent dans les actions et la pensée de militaires à qui le président Abraham Lincoln, le secrétaire de la Guerre Edwin M. Stanton et le Congrès confient le mandat de définir les orientations économiques de la liberté. Guidés par les impératifs militaires, le droit et une foi dans les forces du marché, des hommes nommés Grant, Eaton, Thomas, Howard et Fisk fixent les limites de la responsabilité de l’État en temps de guerre et de paix. De l’occupation du Tennessee, le 6 février 1862, à la certification du treizième amendement, le 18 décembre 1865, on sait que ces hommes neutralisent les espoirs portés en l’agriculture de subsistance. Comme les historiens ont abondamment écrit sur le projet qui consiste à réserver « quarante arpents et une mule » aux anciens esclaves, notre analyse des initiatives militaires privilégiera un devoir qui lui est antérieur, soit celui de protéger la santé des affranchis.3 Imposée à l’État par les esclaves ayant trouvé refuge dans les camps de l’armée fédérale, cette responsabilité culmine avec le délestage des charges matérielles et idéologiques accumulées durant le passage à la liberté. Par l’étude de ce processus, il est possible de distinguer le moment précis où le gouvernement fédéral isole la santé des affranchis de son plan de reconstruction. En facilitant la reconstitution fine du travail préalable de ses représentants, la démarche a aussi le mérite de rendre intelligibles les priorités politiques sur une ligne du temps qui occulte souvent la complexité historique.

La santé des affranchis comprend ici trois éléments : les soins, la subsistance et la protection physique. Nous soutenons qu’elle se négocie durant et après la guerre de Sécession (1861–1865) dans le but d’assujettir les intérêts des Noirs, de l’État et des propriétaires terriens à un idéal de relations sociales de production régi par la liberté, le droit et le marché. C’est la vitesse d’érosion de la relation maître-esclave qui élève cet objectif au rang des priorités de la Reconstruction.4 En fait, au-delà du risque posé par un ennemi qui menace l’Union, la vie des hommes à son service et la sécurité des personnes attachées à sa préservation, le défi le plus urgent de la période émerge d’une émancipation qui « supprime la motivation économique des propriétaires terriens à garder leurs travailleurs en vie et en bonne santé ».5

Des études récentes démontrent qu’il est utile d’explorer ce phénomène d’un point de vue transactionnel et d’introduire le propos par la voie des camps de réfugiés créés par l’armée fédérale au début de la guerre.6 En effet, de cette optique et dans ces lieux, l’État reçoit l’avantage, mais aussi la charge, de maintenir en vie les esclaves fuyant les plantations du Sud confédéré. Depuis le travail pionnier de W. E. B. Du Bois et des historiens du social, nous savons que l’alliance intéressée avec les Africains-Américains a consolidé les positions stratégiques de l’armée fédérale face aux troupes ennemies. En revanche, la pression idéologique et matérielle, exercée sur un gouvernement appelé à soutenir et à garantir la liberté d’un marché et de quatre millions d’individus, occupe une place ambigüe dans l’historiographie : elle inspire des études influentes qui laissent en marge des thèmes, des documents et des méthodes fort estimables.7 La tendance peut être renversée de trois façons. D’abord, en plaçant la santé des affranchis au centre des intérêts irréconciliables de la Reconstruction. Ensuite, en élevant les contrats de travail dans l’étude des rapports qui annoncent les débats sur la citoyenneté. Enfin, en poussant l’analyse du pouvoir vers le bas, notamment pour reconnaître le rôle de la famille noire durant et après la guerre de Sécession.8

Le processus d’émancipation centré sur la santé des affranchis comprend trois phases transactionnelles. La première s’amorce avec la rupture du lien maître-esclave. En temps de guerre, cette phase voit le gouvernement fédéral s’affranchir des dispositions sur les esclaves fugitifs enchâssées dans la Constitution depuis 1787. À sa place, il établit des camps de réfugiés qui transforment les régions conquises en viviers d’émancipation et en bassins stratégiques dans le conflit militaire. Avant et après la proclamation d’émancipation du président Lincoln, ces îlots de refuge, de pouvoir et de travail servent les intérêts des Noirs en quête d’autonomie, mais aussi ceux d’un État veillant à sécuriser l’horizon économique de la relation employeur-employé. La deuxième phase transactionnelle du processus d’émancipation repose sur le principe de l’arbitrage. Introduit à l’aube de l’année 1864 dans les départements du Golfe et du Mississippi, ce dernier se normalise à l’été 1865 et suit les règles de procédure fixées par le Bureau des affranchis. Dans les deux cas, ce principe contribue à l’adaptation sociale et politique aux piliers institutionnels du droit de grief à l’ère de la liberté. Les expériences judiciaires sous contrôle militaire qui précèdent la capitulation des Confédérés et se développent dans l’ombre de la mise en œuvre de la politique de pardon du président Johnson représentent un moment clé de la période de la Reconstruction pour des affranchis lésés par l’attente des initiatives du Congrès en matière de citoyenneté, pour des propriétaires terriens préoccupés par la lenteur de la démobilisation et pour l’historien convaincu que l’émancipation ne suit pas une trajectoire narrative linéaire.9 La troisième phase transactionnelle du processus d’émancipation commence lorsque les militaires pressent les parties à négocier des contrats de travail basés sur les lois du marché. Elle atteint son apogée à l’hiver 1865–1866, quand l’État cesse d’être un employeur et un pourvoyeur de soins pour les esclaves en fuite et qu’il scelle son engagement à sécuriser la vie, la loi et la propriété. Saisies dans leur ensemble, les phases transactionnelles procurent à l’historien de nouveaux outils pour comprendre comment se manifeste le paternalisme qui semble survivre à la guerre.10

Intersection historiographique

Notre étude se situe à l’intersection de trois champs historiographiques. Le premier touche les travaux qui héritent du lien entre la médecine et la gestion de la propriété esclavagiste. Les deux autres champs couvrent respectivement les apports sur le genre et les contributions sur la période de la Reconstruction qui privilégient le thème du travail ou le traitent comme un complément de l’analyse économique. Dans le premier cas, nous proposons d’enrichir le modèle médico-politique qui façonne les réflexions et les recherches historiques. Dans le second cas, nous mettons à jour l’impact de la « culture de la dissimulation » sur la connaissance historique par les phases transactionnelles de l’émancipation et par les documents qui les éclairent. Dans le dernier, nous revisitons l’idée que les contrats de travail sont des sources et des symboles d’oppression à l’aube de la liberté.11

Pendant plus d’un siècle, les historiens ont conclu qu’il existait « une connexion étroite entre des domaines de l’histoire économique et médicale », que « les soins prodigués aux esclaves représentaient l’une des réalités les plus importantes de la gestion d’une plantation » et que la façon dont « les Blancs du Sud esclavagistes assuraient l’hygiène, le logement, la nourriture, l’habillement [...] affectait nécessairement la santé de leur main-d’œuvre noire ».12 La rupture initiale de la relation maître-esclave est un véritable défi pour les chercheurs tentant d’examiner ces connexions, ces réalités et ces pratiques à l’aube de l’émancipation. Considérant avec raison le gouvernement fédéral comme l’héritier des leviers de gestion de la santé des esclaves en fuite, ils ont omis de fixer l’obligation à ses origines et à sa finalité. Dans la foulée de cette lecture, les chercheurs ont accordé une large part de leur attention à la Division médicale du Bureau des affranchis (dmba) formée en 1865. Ces décisions initiales ont engendré deux conséquences. D’une part, l’importance de la négociation dans le processus d’émancipation a été sous-estimée, ainsi que le caractère provisoire de l’engagement de l’État en matière de santé. D’autre part, un vide et un déséquilibre sur le plan de la connaissance se sont installés de deux façons : en s’éloignant durant des années du principe que le contrôle sur les soins et la subsistance dans les régions conquises s’exerçait par le biais d’une collaboration entre l’État, les Noirs et les employeurs loyaux à l’Union; en exagérant l’importance du personnel et des médecins de la dmba dans le quotidien de contemporains qui ajustaient depuis trois ans leurs intérêts à la « loi qui libère les Noirs et les maîtres du même coup ».13 La combinaison de ces incidences a renforcé le lien entre l’historiographie et une thèse contestée, soit celle qui soutient que la Reconstruction, en tout ou en partie, est un échec. En suivant la voie tracée par les travaux de Todd Savitt qui laissent entrevoir l’avantage de fouiller le sujet en amont plutôt qu’en aval, nous orientons différemment notre réflexion et notre interprétation des événements.14

La première tâche consiste à revoir les possibilités offertes par le modèle médico-politique pour éviter que, dans sa forme la plus simple, les affranchis soient représentés comme des victimes passives et intemporelles des actions de l’État. Pour nous, le concept santé des affranchis inclut les soins, la subsistance et la protection physique. Par contre, ce concept n’obéit pas à une approche structuraliste qui s’éloigne d’un examen méthodologique des archives.15 Voilant les potentialités de l’histoire sociale et des chercheurs qui renouvellent leurs compétences par un contact soutenu avec des renseignements fragmentaires et des protagonistes marginalisés, l’approche structuraliste déployée de façon précipitée nous prive du contact avec le vécu qui échappe aux sources narratives et leur donne un sens. Refusant d’adhérer à une posture qui exagère la continuité, sous-estime le changement et – dans le cas de la violence – amplifie la sujétion, nous plaçons le devoir de méthode sur la voie de la dialectique du pouvoir en commençant par les contributions essentielles sur le genre qui élèvent l’historiographie depuis plus d’une génération.

Les actions des protagonistes qui veillent sur la santé des affranchis témoignent d’un attachement à la vie, à la liberté et aux institutions républicaines. Comme les planteurs du Sud, les Noirs ont maintes priorités au-delà de leurs intérêts matériels, et c’est dans la famille que l’historien trouve le moyen le plus fiable de les éclairer.16 La reconstitution des expériences des anciens esclaves ne pouvant reposer sur des propositions d’ordre général, nous choisissons une lecture des sources enrichie par l’histoire des femmes et par « l’influence combinée du viol (ou de la menace de viol), de la violence domestique et de l’oppression économique ». En effet, durant la guerre de Sécession, la lutte des Noirs – exposée dans cet article par le biais des fuites, des plaintes et de la signature de contrats – dépasse le contrôle de leurs forces productives, notamment parce que des facettes de la vie familiale, de la sexualité et des capacités reproductives des femmes façonnent leur quête de justice. La vue d’une expérience aussi complexe impose le recours aux contributions pionnières des pairs. « Les femmes noires », affirme Darlene Clark Hine, « ont développé et adhéré à un culte du secret, une culture de la dissimulation, pour protéger le caractère sacré des aspects intérieurs de leur vie ». Devant les « stéréotypes, les images négatives et les hypothèses débilitantes [qui] ont rempli le vide laissé par des informations inadéquates et erronées sur les véritables contributions, capacités et identités des femmes noires », l’historien se doit de comprendre et d’expliquer « pourquoi les femmes noires se comportent de telle ou telle manière et comment elles ont acquis une certaine autonomie ».17 Les études sur le genre des deux dernières décennies ont fait la démonstration que la période de la Reconstruction était un terrain fertile pour examiner les manières dont les femmes « survivaient et reconstruisaient leur féminité », participaient à « l’articulation du pouvoir » dans l’État et s’élevaient dans le marché du travail.18 La présente étude s’inscrit dans ce courant de renouveau, puisqu’elle cible « ce que nous aimerions savoir » sur les femmes noires à l’aube de leur émancipation en refusant d’attribuer à la culture de la dissimulation une emprise excessive sur les sources et leur valeur heuristique.19 Dans la foulée de ces idées, nous laissons les motivations non économiques éclairer les fondements de la connaissance sur la santé des affranchis. Par exemple, les expériences des femmes et des enfants qui « ont constitué la plus grande partie de la population de réfugiés pendant la guerre » exposent une action d’adaptation à la liberté menée à l’intérieur du marché du travail.20 Elles montrent surtout l’apport des institutions républicaines, comme la famille, dans l’élaboration de stratégies axées sur l’intérêt de ses membres. Nous réalisons qu’il n’existe pas « d’émancipation sans domination » et que l’agentivité a ses limites, mais aussi que la culture de la dissimulation ne dépouille pas le chercheur de ses habiletés. Devant une relation d’autorité, que ce soit celle d’une armée, d’un gouvernement ou d’un employeur, qui traduit une dépendance ou qui plonge dans des secrets personnels, la capacité des historiens à identifier le pouvoir et à distinguer la voix des anonymes est établie depuis belle lurette. Notre article cherche humblement à le rappeler.21

Interpellés par les angles morts du vécu social, nous examinons les contrats de travail qui se trouvent dans le fonds d’archives du Bureau des affranchis pour le Tennessee (T=4 034). Par souci de rigueur, nous retenons deux critères pour la sélection des contrats : l’étendue des données et la nature des renseignements colligés.22 Comme Gerald D. Jaynes est le seul chercheur à offrir un modèle de traitement des sources, nous décidons en premier lieu de suivre sa trace dans le cadre de notre projet. Arrivés au terme de cette démarche, nous reconnaissons que les « contrats de travail représentent la source la plus précieuse pour déterminer l’organisation du travail dans les plantations, les méthodes de paiement de la main-d’œuvre et les relations de travail et sociales entre l’employeur et l’employé et entre les travailleurs pendant les années 1865 et 1868 ».23 Néanmoins, ayant relevé trois failles dans l’approche rigoureuse de Jaynes, nous décidons de choisir une autre voie pour convaincre le lecteur que les contrats de travail éclairent l’histoire de la Reconstruction au-delà des faits économiques et matériels.24 En effet, Jaynes a fragilisé sa base documentaire en omettant les clauses contractuelles sur la santé, la famille noire comme agent de négociation ainsi que les ententes signées entre l’entrée en vigueur de la proclamation d’émancipation et du treizième amendement.25 En considérant ces lacunes, nous suivons l’évolution du système de contrats avant la création du Bureau des affranchis en mars 1865 et structurons la collecte des données autour des clauses de santé et des relations entre les signataires. En même temps qu’il est devenu plus simple de comprendre le délestage par l’État des soins et de la subsistance, il est devenu possible de réduire la dépendance du chercheur à l’analyse matérielle.26 Par nécessité, nous consultons les rapports militaires, les actes parlementaires, les proclamations du président et les journaux intimes de planteurs. Dans ce dernier cas, leur jumelage avec les contrats signés par John Houston Bills – un représentant de l’élite agraire du comté de Hardeman, au sud-ouest du Tennessee – justifie le temps que nous avons investi dans une biographie collective des employeurs suivant la méthode prosopographique. Plaçant au cœur du processus d’émancipation, sans le filtre, voire le biais, des archives militaires, ce jumelage sert en fait à subordonner les cent vingt-huit volumes de la série War of the Rebellion à nos besoins d’enquête.27

Parmi les laboratoires d’observation pertinents pour l’historien, le Tennessee représente un choix logique à plus d’un égard. Il existe en effet peu d’études qui tirent avantage des réalités régionales et des enjeux nationaux répertoriés dans ce carrefour de refuge et d’exode de la Reconstruction.28 État dont la conquête par les armées de l’Union débute le 6 février 1862 avec la prise de Fort Henry, le Tennessee entreprend son adaptation au marché du travail libre en marge des clauses émancipatrices de la proclamation du président Lincoln entrée en vigueur le 1er janvier 1863. Soumis pendant trois ans aux impératifs militaires, au mouvement des réfugiés et au dérèglement de l’exploitation agraire, l’État sécessionniste du Tennessee est la seule juridiction à offrir une adaptation à la liberté aussi longue, notamment dans son creuset esclavagiste de la vallée du Mississippi. Comme les appuis et les résistances au projet d’émancipation ont germé pendant trois ans, plus personne n’est surpris lorsque le Congrès adopte le treizième amendement le 31 janvier 1865, lorsque l’abolition de l’esclavage proposée par la législature du Tennessee reçoit la faveur des électeurs trois semaines plus tard, soit le 22 février 1865, et lorsque le secrétaire d’État, William Seward, certifie les résultats de la ratification du treizième amendement en fin d’année, soit le 18 décembre 1865. Indignée par l’inclusion dans la société civile et le marché du travail d’une minorité ayant trouvé son premier foyer de liberté dans les camps unionistes, l’élite agraire du Tennessee brouille les cartes. Ses représentants demeurés sur les plantations exploitent d’abord la latitude conférée par le statut légal de l’esclavage dans la juridiction pour atténuer l’impact de l’instabilité des opérations agricoles et ralentir l’érosion de leur autorité. Par ailleurs, au moment où l’aumône et le paternalisme se heurtent à la conception stricte de la liberté, sept employeurs du Tennessee sur dix refusent d’acquitter les coûts de subsistance et de soins. Enfouie dans les contrats de travail, cette expression d’intérêts a comme fondement la politique d’amnistie du président Andrew Johnson, la protection constitutionnelle de la propriété, la gestion capitaliste des profits et la multitude de décrets adoptés par l’État durant et après la guerre. L’examen des phases transactionnelles du processus d’émancipation au Tennessee à l’aide des contrats et de leurs compléments narratifs, permet d’élucider le travail d’un gouvernement appelé simultanément à débattre les mérites « de la confiscation et de l’égalité ». Il rend aussi intelligibles les efforts d’anciens maîtres qui ralentissent les initiatives étatiques par un attachement à la liberté profondément original dans son essence. À travers la dialectique du pouvoir, ces phases rappellent en fait pourquoi il s’est avéré plus difficile de mettre en œuvre la vision du travail libre que d’en proclamer la supériorité.29

Îlots de refuge et de transactions

« Avec votre autorisation, je prendrai Fort Henry, sur la [rivière] Tennessee, et établirai et tiendrai un large camp à cet endroit », écrit Ulysses S. Grant le 28 janvier 1862. Faisant preuve de mépris pour l’ennemi ou assuré de le vaincre sur son terrain, voire incapable de prendre la pleine mesure du désir d’indépendance des esclaves, c’est en ces termes que le général de brigade demande à son supérieur, le major général Henry W. Halleck, d’engager les troupes fédérales dans l’une des régions stratégiques de la guerre de Sécession. Moins de dix jours plus tard, l’officier A. H. Foote confirme la victoire de ses unités navales et terrestres en remplaçant le drapeau confédéré par celui des États-Unis et en équipant le fort de canons, de baraques et de tentes pour accommoder 15 000 hommes. Le 16 février, vingt kilomètres à l’est, sur les rives de la Cumberland, Grant rapporte lui-même fièrement la capitulation du Fort Donelson et son bilan de conquête : 12 000 prisonniers, une quarantaine de pièces d’artillerie et un nombre élevé de magasins, chevaux, mules et autres propriétés confisqués.30

À moins de 200 kilomètres au sud-ouest, John Houston Bills consigne cette « horrible nouvelle » dans son journal. Pour ce membre de l’élite agraire, la prise des forts Henry et Donelson n’est cependant que le premier d’une série de bouleversements locaux à résonance nationale. Le 25 février, l’armée de l’Ohio, sous le commandement du général de brigade Don Carlos Buell, triomphe à Nashville; le 7 avril, l’armée du Tennessee menée par Grant – nouvellement promu au rang de major général – repousse l’attaque surprise de Shiloh à la frontière du Mississippi, grâce au renfort des troupes de Buell; le 6 juin, après la prise de Memphis, les garnisons fédérales achèvent de placer sous leur contrôle les résidants des comtés du centre et de l’ouest du Tennessee, y compris ceux de Hardeman. C’est à Bolivar, chef-lieu de ce dernier comté, que sont alors confinés Bills et ses partenaires d’affaires pendant trois ans – sauf ceux qui acceptent le serment exigé par le major général Lew Wallace et ses successeurs. Dès son entrée dans ce « courant de guerre totale », Bills tente de résister à l’occupation fédérale. En rapportant au général de brigade, commandant des régiments de l’armée confédérée à Bethel – village situé entre Bolivar et Shiloh –, les renseignements sur les troupes fédérales qu’il collige durant les quatre jours où il est détenu et qu’il promet de garder secrets en échange de sa libération sous caution, l’esclavagiste met sa liberté et sa fortune en péril. Comme ses placements obligataires, cette autre forme d’appui aux rebelles est infructueuse : les divisions de l’armée du Tennessee exerceront un contrôle sur la région jusqu’à la fin de la guerre.31

Par opposition à ses intérêts fonciers au Tennessee, au Mississippi et en Arkansas, la résistance des esclaves de Bills est nettement plus efficace que la sienne. Dès le début de l’occupation de Bolivar par trois régiments fédéraux, Bills note que ses esclaves « ne travaillent pas bien ». Cette constatation a pour toile de fond l’exode local qui a inspiré le soldat-peintre Theodor Kaufmann pour son œuvre intitulée On to Liberty (1867). Comme aucun esclave parmi la vingtaine de Noirs qui trouvent refuge dans le camp riverain de Bolivar le 10 juin ne lui appartient, Bills continue à noter dans son journal les effets apaisants du temps clément, la quantité de coton épargnée par les Confédérés en retraite, les sermons apolitiques des pasteurs protestants, l’ensemencement des fèves dans les champs de maïs récolté hâtivement et l’activité des troupes sur le territoire. En revanche, le deuxième mois de l’occupation militaire à Bolivar secoue sa confiance paternaliste en 90 esclaves soi-disant « bien et satisfaits » sur ses trois plantations et dans sa demeure ainsi que son allégeance opportune au gouvernement des États-Unis. Dans les jours précédant la signature de la deuxième loi de confiscation par le président Lincoln le 17 juillet 1862, Bills plonge à nouveau dans les perspectives de l’horreur lorsqu’il apprend « l’intention du Congrès américain d’armer les [Noirs] ». Vite pointés du doigt par le vieil homme pour le saccage et le pillage de propriétés dans les environs, ou considérés comme investissements dévalués ou perdus par l’ensemble des esclavagistes du village, les Noirs de Bolivar « s’attroupent dans l’espoir d’être émancipés par les forces fédérales ». Parmi ceux-ci, deux esclaves appartenant à Bills sont « arrêtés et conduits devant le grand prévôt » avant de lui être remis dans le respect de son serment de fidélité à l’Union. La cinquantaine d’esclaves qu’il rencontre ensuite sur la route menant au camp fédéral le 4 août 1862 maintiennent la pression sur les officiers, lesquels se trouvent à nouveau tiraillés entre les dispositions d’une loi du Congrès et celles d’un ordre du général Halleck qui définit le refus d’admettre les esclaves fugitifs comme une précaution face au danger que comportent les renseignements transmis à l’ennemi confédéré. Dans les régions de la vallée du Mississippi, du golfe du Mexique et de la côte Atlantique sous le contrôle des armées fédérales, le nombre d’esclaves fugitifs rend désormais inconcevable un tel péril. Du point de vue de Salmon P. Chase, secrétaire du Trésor, c’est la « restauration de l’ancienne Union, avec l’esclavage intact » qui est considérée comme irréaliste. Lorsque le président Lincoln entérine cette position à l’été 1862, les réclamations de Bills auprès des officiers supervisant les esclaves en fuite laissent entrevoir la possibilité d’une évaluation basée sur la loi plutôt que sur un décret militaire critiqué. Dans les faits, et avant l’ordre édicté par Grant le 11 août 1862, le pouvoir discrétionnaire s’exerce de façon pragmatique et suivant une logique genrée : les femmes et les enfants placés sous garde sont promptement remis aux propriétaires fidèles à l’Union, alors que les hommes, mis à contribution pour le travail sur les fortifications, demeurent dans les camps. Les leçons transmises dans les mois suivants sur les préceptes de ce processus transactionnel attestent que le projet qui consiste à maintenir l’équilibre entre les objectifs de guerre, l’approvisionnement des besoins, les devoirs de la liberté et la foi en la justice est précurseur de l’orientation des contrats de travail signés à l’hiver 1865–1866.32

Des hommes comme Bills mesurent d’emblée le sens des transactions à venir entre les militaires et les réfugiés noirs selon des repères monétaires. Toutefois, à cause de la fuite des esclaves, le vieil homme réalise vite que les pertes de 100 000 dollars consignées dans son journal au début de la guerre renvoient à une comptabilité bancale. Lors de l’un de ses déplacements réguliers vers les quartiers généraux du camp de Bolivar et de son département des Noirs, à l’automne 1862, Bills identifie cinq esclaves sous son nom dans le registre nominatif et quatre autres appartenant à son beau-fils, le capitaine confédéré Marshall T. Polk, prisonnier sous observation médicale dans un hôpital du Nord depuis l’amputation de sa jambe droite suivant la bataille de Shiloh. Pour cette dizaine de réfugiés travaillant sur les parapets depuis cinq semaines, Bills n’obtient aucune promesse d’un retour sur la plantation, seulement un avis officiel autorisant l’un des esclaves malades à « demeurer à la maison » le temps de son rétablissement. Si les injonctions et l’omniprésence des soldats le contrarient, « leur insupportable influence pernicieuse sur [son] peuple noir » et l’insubordination des Noirs « qui excède toute description » depuis l’évacuation de Corinth en mai représentent pour lui le plus ignominieux des destins. La sécheresse de l’été, les militaires qui remplissent clandestinement des dizaines de charrettes remplies de maïs, l’épuisement des réserves de blé et la « diminution quotidienne des porcs et des bœufs de boucherie » annoncent bien plus qu’une famine et l’obligation pour l’armée de prendre en charge tous les Noirs, sans exception. Les Noirs « ne travaillent plus avec entrain », griffonne Bills dans son journal le 8 septembre 1862. S’ils « ont droit au découragement », poursuit-il dans un égarement de lucidité empathique, c’est parce que « tous les fruits de leur travail sont perdus pour la présente année ». Dans ces conditions, les esclaves agissent à leur tour sans permission en fuyant la plantation, en refusant d’y retourner, en feignant le désir d’y revenir pour « voler » femmes et enfants et en montrant qu’il est méprisable de déplorer leur migration, leur « peu d’attachement à la famille » ou de récriminer au Sud comme au Nord contre le projet d’émancipation. Les Noirs hantent l’esprit de Bills. S’il continue à liquider son coton à un prix record, il mène ses affaires courantes avec peu de vigueur en maudissant l’initiative de ses producteurs autant que la guerre. « Mis à part la foule animée d’hommes et de mules, de chariots et de bétail, le coton et le comptage des billets verts, les plaintes constantes des paysans contre les [Noirs] qui s’enfuient et les vols de tout ce qui est tangible, je n’enregistre rien de nouveau aujourd’hui ».33

Les officiers de l’Union comprennent que le succès de leurs opérations dans cette région de l’ouest du Tennessee passe par la surveillance étroite, voire l’arrestation, de résidants influents comme Bills. « Ils sont informés de toute attaque contre la ville », écrit le major général S. A. Hurlbut à son homologue de Bolivar. « Si vous les trouvez impatients de sortir de la ville, redoublez de vigilance et signalez-les. » La recommandation éclairée s’inscrit dans le plan de défense de Corinth, au Mississippi, que le major général Grant tente de sécuriser à l’approche d’une armée confédérée « renforcée par l’échange de prisonniers, les troupes du Texas et de l’Arkansas et des conscrits ». Dans l’échelle des priorités militaires, la gestion des camps a préséance sur la surveillance des élites, notamment au moment où les esclaves fugitifs arrivant « par wagons bondés » nuisent à la capacité de défendre les lieux occupés et le stock de vivres.34

À la fin de l’été 1862, Grant s’enquiert auprès du secrétaire Stanton des principes régissant les « larges lots de femmes et d’enfants » dont il a déjà accepté le transport à Cairo, en Illinois, transfert que le membre du cabinet Lincoln suspend à la mi-octobre alors que « le désir irrésistible de démontrer la supériorité du travail libre dans les exploitations agricoles et les plantations du Sud » inspire les Républicains. Grant nomme John Eaton, l’aumônier du 27e régiment d’infanterie de l’Ohio, responsable des fugitifs dans le district de l’ouest du Tennessee pour adapter, selon la volonté de son supérieur, la gestion de cette population qui ne peut plus être chassée des camps ni être déplacée pour servir les résidants du Nord. Désignant Grand Junction, au sud de Bolivar, quartier général des opérations, Grant décrète que ce camp offre trois formes d’aide aux réfugiés – les soins, la subsistance et la protection physique – en échange de leur travail dans les unités militaires ou la production cotonnière. Deux jours plus tard, une correspondance avec le général Halleck clarifie et élargit le champ d’action du nouvel intendant plus habitué à offrir des sermons, à donner les derniers sacrements et à correspondre avec les familles endeuillées qu’à s’occuper des questions de santé. « Le secrétaire de la Guerre ordonne que vous employiez les Noirs réfugiés comme chauffeurs, ouvriers […] au sein du département de l’approvisionnement, des forts, des chemins de fer […] aussi, dans la cueillette et le transport du coton, pour le bénéfice du gouvernement. Autant que possible, assurez leur subsistance et celle de votre armée sur le compte des habitants rebelles du Mississippi. » À l’approche de l’hiver, Grant et Eaton fixent eux-mêmes les échelles salariales pour le contingent d’ouvriers appelés à servir parmi les quelque 4 000 Noirs répertoriés dans les camps de Grand Junction, La Grange, Bolivar et Jackson. Sur les plantations abandonnées, les montants à verser aux Noirs sont de douze cents et demi par livre de coton récolté et égrené, tandis qu’au service du gouvernement, notamment dans les cantines et les hôpitaux de camp ou pour la coupe du bois alimentant les bateaux à vapeur, la compensation est transférée dans un fonds réservé aux frais de subsistance et de soins.35

Pour Grant, le travail représente une planche de salut menant au service militaire et au vote. Cette vision est hautement ambitieuse, puisqu’elle se fonde sur la sécurité du travailleur rémunéré et la collaboration de planteurs aux allégeances obscures contraints d’accepter les « conditions élaborées et autant que possible maintenues par les forces de l’Union ». Comme cible de mépris, de critiques et d’attentats, et témoin de l’effet des déboires de la guerre sur l’état de ses provisions et réalisations, l’aumônier militaire, promu au rang de superintendant des « contrebandes » pour l’armée du Tennessee le 17 décembre 1862, comprend mieux que quiconque les risques de la vision de Grant. Après le « désastre » de Holly Springs survenu le 20 décembre 1862 – pendant lequel une cavalerie confédérée détruit plus d’un million de dollars de fournitures réservées à l’armée de Grant – et après avoir reçu l’ordre de déplacer le camp à Memphis, Eaton apprend à ses dépens que des militaires et leur infrastructure d’opération ne se meuvent pas comme une charrette remplie de foin. Lorsque des milliers d’individus conscients de leur vulnérabilité par rapport aux scélérats confédérés s’ajoutent à l’équation, chacun des trains réquisitionnés de la ligne Memphis-Charleston se remplit sans la possibilité « d’organiser et de contrôler » le transport des réfugiés. Accroupis sur les toits, accrochés aux portes des wagons de marchandises et exposés au froid de décembre rendu glacial par le mouvement des locomotives, les Noirs transgressent les normes d’assignation des places pour survivre et fracasser les chaînes de leur oppression. Dans la ligne du temps quant au danger bien réel d’un retour au statut d’esclave sur la plantation, ce fait éclaire les récits de violence qui glacent le sang et troublent les esprits. Il enrichit surtout le registre et l’analyse du processus transactionnel unissant les Noirs, les militaires et l’État fédéral à quelques jours seulement de l’entrée en vigueur de la proclamation d’émancipation.36

Le 1er janvier 1863, le Daily Rebel Banner de Murfreesboro, au sud de Nashville, publie l’offre de récompense de 50 dollars pour l’arrestation, la restitution ou des renseignements menant à la capture de deux « gamins noirs » en fuite. Que leur propriétaire les considère comme esclaves suivant une proclamation d’émancipation excluant le Tennessee de la liste des états rebelles ou un désaveu de la légitimité du décret présidentiel importe peu. La bataille de Stones River ayant éclaté la veille laisse derrière elle non seulement le plus important charnier de la guerre au Tennessee, mais aussi un phare d’émancipation pour plus de 50 000 Noirs recensés en 1860 dans le comté de Rutherford et ses régions frontalières. Comme à l’ouest, la décision de quitter la plantation pour les camps représente l’aspiration d’une rupture permanente avec le passé et la confiance en un partenariat récent fondé sur des avantages mutuels. La consolidation des positions fédérales en échange d’une défense et d’un salaire s’avérant une transaction fructueuse depuis près d’un an, le camp de Murfreesboro se transforme en lieu de refuge privilégié pour les mêmes raisons avant la fin du mois. Dans son décret du 27 janvier, le général en charge de l’armée de Cumberland, William S. Rosecrans, transmet à ses hommes les directives de retour dans leur régiment respectif et aux Noirs, comme aux citoyens locaux, les conditions d’emploi associées à des métiers tels que conducteurs, ouvriers, cuisiniers, serviteurs et préposés aux soins « payés conformément à la loi du Congrès », en incluant la subsistance, moins la déduction pour vêtements. Toutefois, pour prévenir l’« immoralité », Rosecrans enjoint à ses officiers de réserver, presque exclusivement aux hommes, le « certificat » de travail requis pour demeurer dans les camps. Dans le domaine élargi, mais genré de la liberté, le poids du nombre et ses effets sur la discipline, le travail, la maladie, l’intérêt public et les ressources rendent pressant le besoin de normaliser par contrats l’entrée sélective dans les camps.37

À des « salaires raisonnables »

Une semaine après que le président Lincoln rend publique la version préliminaire de la proclamation d’émancipation le 22 septembre 1862, le secrétaire de la Guerre, Edwin M. Stanton, fait connaître son interprétation des dispositions que cette version renferme sur les « salaires raisonnables » à offrir aux « personnes ainsi déclarées libres » acceptant de « travailler loyalement » pour les États-Unis. En ordonnant au quartier-maître général, Montgomery C. Meigs, de déduire cinq dollars à la rémunération mensuelle des chauffeurs et ouvriers noirs de l’armée fédérale pour porter au crédit du fonds de subsistance et de soins réservé aux femmes et aux enfants incapables de trouver du travail, Stanton s’impose cependant en héraut maladroit du précepte central de la reconstruction économique. Parmi les façons d’inculquer aux Noirs le principe de subvenir à leurs besoins pour parer l’État contre les charges de l’émancipation, le prélèvement inopiné à la source incommode les principaux intéressés autant que les fédéralistes comme Meigs. Craignant « beaucoup d’insatisfaction » et le risque de « priver le gouvernement des services d’une grande portion » de ces travailleurs en demande, le quartier-maître général invite son supérieur à repenser cette ponction « considérable » qui représente jusqu’à un quart du salaire mensuel récemment consenti aux Noirs du district de Colombie et de la ville d’Alexandrie, voire des coupes préjudiciables à l’effort de guerre et au projet d’émancipation, puisqu’elle ne touche pas les Blancs. Ayant comme réponse le mutisme du secrétaire, Meigs risque peu à le désavouer en laissant au marché le soin de déterminer la valeur de la compensation, et aux officiers la microgestion des « salaires raisonnables » versés aux réfugiés après l’entrée en vigueur de la proclamation de Lincoln. Comme l’employeur appelé à « ajuster son offre pour conquérir un tiers » au sein d’une économie ouverte à la concurrence, l’État qui adapte la sienne à l’imprévisible temps de guerre doit tolérer l’intervention ponctuelle de ses agents pour maintenir l’attraction matérielle du travail sous l’échelle auréolée du service militaire. Le décret 46 du général Butler dans le département de la Virginie et de la Caroline du Nord valide la pertinence de l’intervention ciblée quand le gouvernement, en conflit avec lui-même, verse aux travailleurs des salaires supérieurs à ceux offerts aux soldats et à leur famille. La comparaison entre les rapports d’enrôlement de l’adjudant-général Lorenzo Thomas et les premiers bilans d’organisation du travail sur les terres abandonnées indique que les ajustements introduits avant la fin de l’année 1863 sont la source d’autres tourments. D’une part, le passage à la liberté sur des plantations privées des effectifs les plus productifs augmente la dépendance à l’État pour la protection, la subsistance et les soins. D’autre part, la transition émancipatrice, sans les hommes et les jeunes garçons à l’emploi des militaires, prive la famille noire – avant la bataille d’Appomattox – d’une occasion unique d’asseoir son retour sur la terre avec l’entièreté de ses membres.38

Il est utile de passer en revue l’histoire de la mise en œuvre du plan régional de reconstruction économique au printemps 1863 alors que le gouvernement intègre les réfugiés au projet de loi contesté qui impose la conscription aux Américains. La tension entre la promesse d’émancipation et la nécessité militaire aide en effet à saisir trois phénomènes : (1) la nature des contrats de travail proposés aux affranchis et aux locataires des terres abandonnées avant la fin de la guerre; (2) les changements apportés aux ententes pour promouvoir la confiance et limiter les risques liés à l’engagement dans le système de contrats; (3) la reconstruction de la féminité au sein des familles privées des pères et des fils mis au service de l’armée fédérale et de ses régiments noirs.

Émanant comme il se doit du secrétaire Stanton, le plan mobilise initialement des représentants du milieu politique, des affaires et des sciences pour la collecte de renseignements sur « la condition de la population noire émancipée par des lois du Congrès et la proclamation du président du 1er janvier 1863 ». Parmi eux, Robert Dale Owen, James McKaye et Samuel G. Howe sont choisis pour assurer la direction de l’American Freedmen’s Inquiry Commission (aficCommission américaine d’enquête sur les affranchis). N’ayant pas d’échéancier fixe dans le cadre de leur mandat, les commissaires de l’Indiana, de New York et du Massachusetts ne subissent pas la pression du déploiement des mesures pratiques pour assurer la protection et l’avancement des Noirs. Leurs recommandations préliminaires du 30 juin 1863 et finales du 15 mai 1864 permettent pourtant d’identifier les actions politiques consensuelles qui doivent être placées au centre d’une reconstruction garantissant l’hégémonie de l’économie de marché. À cet effet, la mesure la plus importante est la création du Bureau des affranchis par une loi du Congrès votée le 3 mars 1865. Cependant, les efforts quant aux interventions prioritaires sur le terrain passent au préalable par l’adjudant-général Thomas à qui le secrétaire Stanton confie le pouvoir discrétionnaire et l’autorité de faire « tout ce qui est nécessaire » pour permettre aux Noirs « de subvenir à leurs besoins et de rendre un service utile à quelque titre que ce soit au gouvernement ». Après ses inspections au Tennessee (Memphis), en Arkansas (Helena), en Louisiane (Lake Providence) et au Mississippi (Milliken’s Bend), Thomas informe Stanton qu’il est déjà trop tard dans la saison pour exécuter le plan d’occupation et d’exploitation des terres abandonnées transmis à ses hommes le ١٥ avril. Réagissant à cette information et ressentant le besoin de rétablir le rythme de travail en milieu rural, le membre du cabinet Lincoln, à la recherche de leviers aux effets immédiats, donne alors au gouverneur militaire du Tennessee, Andrew Johnson, le contrôle des plantations et des terres abandonnées ainsi que l’intendance des esclaves de tous âges, aptes au travail, ou non, au sein de sa juridiction.39

Les contrats qui sont proposés dans cet enchevêtrement d’autorités remplissent une double fonction : ils appuient la mise en œuvre des dispositions de la loi fédérale de gestion des terres abandonnées du 12 mars 1863 et l’enseignement des droits et des obligations auprès d’affranchis et de planteurs réintroduits au marché du travail dans le respect du plan qui sera élaboré par l’adjudant-général Thomas le mois suivant. Nommés par ce dernier, les administrateurs du programme dans la vallée du Mississippi veillent, telles des sentinelles, sur les six conditions imposées à l’exploitant locataire prêt à embaucher les affranchis : (1) le paiement d’une taxe sur les récoltes à hauteur de 2,00 $ par 400 livres de coton et de 0,05 $ par boisseau de maïs et de pommes de terre; (2) le versement mensuel des salaires en proportion de l’âge et du sexe (soit 7 $ et 5 $, respectivement pour les hommes et les femmes de plus de 15 ans, et la moitié de ces montants pour les garçons et les filles de 12 à 15 ans); (3) le soutien alimentaire, non déductible sur la rémunération, pour toute la durée de l’engagement; (4) la couverture vestimentaire soustraite au gain; (5) la déférence à la famille noire qui fait le choix de constituer une unité de production; et (6) l’absence de garantie de défense des travailleurs par l’armée. En vigueur jusqu’au 1er février 1864, les termes de ces ententes initient les signataires à leurs droits et responsabilités sur le marché de la liberté. Les rapports de l’armée, de l’afic et, subséquemment, de la Western Sanitary Commission (WSC – Commission sanitaire de l’Ouest) révèlent toutefois des développements si accablants – notamment eu égard à la sixième disposition – que le président Lincoln juge nécessaire de décréter un remaniement d’autorités le 9 octobre 1863.40

En transférant la gestion de « toutes les maisons, terres, immeubles et plantations […] abandonnés » au département du Trésor à l’aube des engagements supervisés de l’année 1864, Lincoln consent à ce que le secrétaire Salmon P. Chase et ses représentants civils libèrent la vision républicaine du marché, notamment auprès d’officiers militaires de rang supérieur comme Thomas qui ont jugé utile de préserver une partie des obligations paternalistes de l’esclavage.41 Les modulations introduites au système de contrats le 7 janvier 1864 ciblent en effet les problèmes engendrés par un projet que l’on a déployé sur le territoire sans harmoniser l’échelle des salaires à l’offre de main-d’œuvre. Premièrement, la taxe sur les récoltes a plus que doublé par l’établissement d’un prix minimum (0,02 $/livre de coton) majoré selon le niveau de protection, l’état des immeubles et l’étendue des améliorations à l’exploitation agricole, et une partie de ce prélèvement (0,01 $/livre de coton) est transférée au fonds de subsistance pour les démunis, les jeunes et les personnes handicapées. Deuxièmement, pour refléter les capacités physiques variées des individus, le modèle de rémunération est revu de deux façons : en créant trois groupes d’âge, soit (1) 20–40 ans, (2) 15–19 ans et 41–50 ans et (3) 12–14 ans et plus de 50 ans; et en introduisant de nouvelles balises salariales entre les sexes, soit 25 $ et 18 $ pour la première catégorie, 20 $ et 14 $ pour la deuxième et 15 $ et 10 $ pour la dernière. L’augmentation des salaires mensuels annonce la troisième permutation, c’est-à-dire l’obligation pour les affranchis de payer leurs frais de subsistance, y compris la nourriture, en échange d’un arpent de terre utilisé à des fins de jardinage et d’hébergement pour la famille entière, sans aucun frais. Si l’augmentation des rentes et des salaires, voire la diminution de la dépendance sous le plan amendé par le département du Trésor, permet aux instigateurs d’envisager l’avenir dépouillé de clauses paternalistes, l’insécurité physique se charge de leur rappeler qu’elle demeure la source des grands dérangements. En misant sur la présence de régiments noirs à proximité des plantations, le travail des soldats en période d’accalmie et le mirage des retours sur l’investissement, l’agent qui signe le rapport remis au secrétaire Chase au début de l’année 1864 sous-estime la vulnérabilité du lien à une armée elle-même profondément engagée dans un conflit à l’issue encore incertaine.42

Nous avons inventorié 37 contrats de travail dans le fonds d’archives du Bureau des affranchis pour l’année 1864, soit des ententes qui réunissent 26 planteurs et 540 affranchis dont la majorité d’entre eux font partie d’une unité familiale (504/540 [93,3 p. 100]), sont établis dans le comté de Shelby, au Tennessee (423/540 [78,3 p. 100]), et sont expressément soumis aux dispositions du département du Trésor (439/540 [81,3 p. 100]) sur des plantations bordant les eaux du Mississippi (512/540 [94,8 p. 100]). L’analyse de ces ententes révèle quatre autres faits : les salaires promis aux travailleurs franchissent à peine la barre inférieure de l’échelle fixée par le département du Trésor; les contrats offrent une plus grande latitude à l’exploitant locataire pour rentabiliser son capital; la présence militaire n’assure pas plus la stabilité des opérations agricoles que la sécurité physique de la main-d’œuvre; et la transaction supervisée n’accorde aucune attention ou valeur marchande aux soins prodigués en cas de maladie.43

Tableau 1 – Contrats de travail, affranchis et employeurs au Tennessee (1864–1868)*

Année

de travail

Contrats

Affranchis

Employeurs

N

%

N

%

N

%

1864

37

1,0

540

3,3

26

1,0

1865

141

3,5

757

4,6

127

4,7

1866

3 364

83,4

13 288

80,3

2 328

86,7

1867

469

11,6

1 908

11,5

187

7,0

1868

20

0,5

56

0,3

14

0,5

Autres

3

-

9

-

2

0,1

Total

4 034

16 558

2 684

* Voir tnfb, M999, microfilms 20-25; fbtfo, T142, microfilms 65–72. Il ne faudrait pas confondre l’année de travail avec les dates de signature du contrat ou de début du travail. Par exemple, les contrats pour l’année de travail 1866 sont signés durant l’année 1866 à hauteur de 72 p. 100 et tous les autres, en 1865, à hauteur de 28 p. 100, principalement en décembre. En ce qui concerne le début du travail, il faut noter que certains contrats d’une durée d’un an chevauchent deux années. Dans ces cas, l’année de travail a été déterminée selon le nombre de mois le plus élevé enregistré par l’une ou l’autre des périodes.

Le 2 janvier 1864, à la conclusion de sa négociation avec douze affranchis, John Thompson, du comté de Shelby, au Tennessee, restreint leur compensation à des salaires mensuels – tous inférieurs aux normes selon l’âge et le sexe prescrites cinq jours plus tard par le gouvernement, à l’exception des 25 $ par mois promis à Lausen Anderson pour les huit semaines que dure le contrat. Au sein de ce groupe constitué de deux vieillards, deux femmes et six garçons de quatorze ans ou moins, les perspectives de retour sur l’investissement demeurent toutefois modestes. À la fin du mois, Galen J. Green, du même lieu, signe une entente qui offre sept dollars par mois à quatre affranchis pour l’année se terminant le 31 décembre, six et cinq dollars par mois à quatre autres ainsi que la nourriture et le vêtement à trois filles trop jeunes à ce moment-là pour le travail sur la plantation. À nouveau, les données indiquent que l’offre de main-d’œuvre sur une ferme domestique gêne le rendement du capital. L’embauche de 26 membres des familles Erving et Rawlings par William W. Trigg le 25 mars 1864 illustre pourtant comment l’exploitant locataire dégage des profits. Par exemple, la tenue de livres de Trigg montre que les travailleurs sont soumis à la déduction des frais de subsistance tel que l’admet le plan du département du Trésor. Sept mois après la ratification du contrat, Trigg règle une facture de 764,34 $ auprès d’un marchand local pour l’achat de bacon, sucre et autres produits non périssables effectué depuis le mois d’avril, et la soumet ensuite aux autorités locales comme preuve de crédit salarial. En dépit du fait qu’un débit mensuel sur les salaires de 128 $ soit inscrit dans le registre des affaires courantes, il est plus intéressant, pour situer le sujet de la perspective des travailleurs, de souligner que les ententes se négocient avec des familles et que le système naissant des contrats n’offre aucune protection contre la vulnérabilité matérielle et physique.44

Tableau 2 – Contrats de travail, affranchis et unités familiales (1864–1868)*

Année

de travail

Affranchis

Chefs de famille

Total

Avec famille

AF (%)

Hommes

Femmes

F (%)

1864

540

504

93,3

19

13

40,6

1865

757

638

84,3

73

51

41,1

1866

13 288

12 525

94,3

2 299

822

26,3

1867

1 908

1 778

93,2

342

80

19,0

1868

56

39

69,6

14

1

1,0

Autres

9

9

100

1

2

66,7

Total

16 558

15 493

93,6

2 748

969

26,1

*Pour les sources, voir le tableau 1. Les valeurs situent chaque signataire dans sa relation au sein de l’unité contractuelle, y compris ceux et celles dont le lien patronymique ou familial est inconnu, ce qui représente plus fidèlement la communauté d’intérêts prête à s’engager auprès des employeurs. Par exemple, un affranchi qui fait partie d’une unité contractuelle au sein de laquelle nous avons établi une ou plusieurs relations familiales appartient au groupe de la catégorie Avec famille qui signe un contrat, et ce, même s’il est non apparenté ou même si la relation est inconnue. À ce sujet, voir Penningroth, The Claims of Kinfolk.

Le 15 février 1864, A. M. Johnson du comté de Mississippi en Arkansas paraphe une entente avec 58 affranchis suivant les règles de location et d’embauche établies par le département du Trésor. Le contrat avec ces neuf familles menées principalement par des femmes (7/9) et réunissant une majorité d’enfants convient à Johnson, puisque, le mois suivant, il s’engage auprès de neuf affranchis (sans lien de parenté apparent) sur les mêmes bases. La guérilla confédérée contre les familles Guy, Hollem, Johnson, Knight, McGee, Sledge, Taylor, Weatherly et Williams provoque toutefois le démantèlement de ses deux plantations presque aussitôt, soit le 10 avril. Cinq jours plus tard, J. N. Fain et quinze affranchis sous contrat sont contraints à leur tour de quitter l’exploitation agricole dans la région de Memphis pour protéger les femmes et les enfants constituant l’essentiel de la main-d’œuvre. Ces événements surviennent dans le contexte du massacre de Fort Pillow, soit le 12 avril, situé à soixante kilomètres au nord de Memphis, durant lequel des Confédérés, sous le commandement de Nathan Bedford Forrest, abattent des dizaines de soldats noirs, une action dénoncée notamment parce qu’elle enfreint les règles d’engagement. Il est utile de souligner que les violences de ce genre sur les deux rives du Mississippi – perpétrées par des hommes qui jugent insupportables la liberté des Noirs et la possession de leurs terres par des ennemis idéologiques – atteignent un sommet six semaines après que Lincoln demande à l’adjudant-général Lorenzo Thomas de se rendre dans la région « immédiatement » pour prendre l’entière direction des réfugiés et des terres abandonnées. Parmi les jours sombres de l’année 1864, l’historien peut difficilement ignorer celui où le président réalise que le problème d’insécurité physique et matérielle des esclaves en fuite ne se résout pas au département du Trésor ni à coups de décrets – même ceux du département de la Guerre qui compte alors près de 200 000 soldats dans les seuls départements du Tennessee et de Cumberland. Le 11 mars 1864, dans l’injonction de celui qui comprend la situation « mieux que quiconque » est pourtant réapparu l’espoir ravivant les plans de justice économique et sociale.45

Justice : approche institutionnelle, vécu social

Le droit vient à la rescousse du processus d’émancipation le 11 mars 1864 par l’ordre de l’adjudant-général Lorenzo Thomas.46 Réalisant que l’armée ne peut pas servir indéfiniment les intérêts des Noirs et du système de contrats, l’officier inaugure le chapitre des tribunaux militaires par un plan de justice prévôtale. Nous avons souligné les différences des projets de reconstruction économique adoptés par les départements de la Guerre et du Trésor, notamment eu égard à la rémunération et à l’étendue de la couverture des frais de subsistance. Pour être satisfaisante, cette perspective institutionnelle doit maintenant permettre au droit de justifier sa place dans la deuxième phase transactionnelle de la liberté.47

Pour l’adjudant-général Thomas, le plan du Trésor comporte deux failles en matière de droit. La première concerne l’autorité à qui l’on confie le pouvoir de réparer les infractions contractuelles. La deuxième, le nombre des effectifs disponibles sur le terrain. Par exemple, le redéploiement, en février 1864, des troupes de Sherman vers le sud-est réduit le bassin de soldats au service de l’autorité civile. Appelés à sécuriser les opérations agricoles et à satisfaire les parties lésées au milieu de ces manœuvres militaires, les surintendants du Trésor deviennent les cibles faciles de critiques en provenance notamment de ceux qui voient dans le droit un rempart à la propriété. Dans son décret du 11 mars 1864, l’adjudant-général Thomas formalise cette vision par la nomination de « prévôts répartis en des points appropriés dans le voisinage des plantations louées » (sect. ii). En plus de « veiller à ce que la justice et l’équité soient observées dans toutes les relations entre les employeurs d’affranchis et ceux qui sont employés » (sect. ii), il donne aux prévôts le droit d’exercer « toutes autres fonctions de police » sous les ordres de leur supérieur de district, y compris le contrôle sur les armes prohibées (sect. xi), le désordre social (sect. xx) et le trafic d’influence (sect. xxi). Malgré sa nature embryonnaire, ce nouveau pouvoir judiciaire revêt une grande importance au printemps 1864, et ce, jusqu’à la création des tribunaux militaires administrés par le Bureau des affranchis après le 30 mai 1865. Car les « salaires raisonnables » de la proclamation de Lincoln valent bien peu lorsqu’ils restent dans les poches de l’employeur, lorsque des hommes sans scrupules exploitent impunément les vulnérabilités des travailleurs et lorsque l’État offre peu de moyens légaux aux affranchis pour obtenir réparation.48

L’initiative est judicieuse, puisque, au même moment, l’intendance des divisions militaires du Golfe et du Mississippi transfère aux exploitants locataires la charge financière des soins offerts aux affranchis. Près de deux ans avant la négociation des contrats proposés aux signataires émancipés à l’hiver 1865–1866, cette mesure annonce le délestage des charges en santé assumées par l’État depuis le début de la guerre. À l’abri de critiques en provenance de Républicains refroidis par la confiscation du capital, le plan de Thomas reflète un double souci d’équité. D’une part, il rappelle que l’État doit supprimer tout privilège conféré à l’exploitant locataire sur les esclavagistes loyaux payant les dépenses en santé. D’autre part, il informe les affranchis que la couverture des frais médicaux s’acquitte par un travail « respectueux, honnête et fidèle » à l’employeur, sinon par un service non rémunéré à l’État. Le 11 mars 1864, il est trop tôt pour mettre en œuvre l’intégralité de la théorie du marché du travail libre tel que le souhaitent les porte-parole du Trésor. Le mois suivant, Thomas en explique les raisons. Il est déraisonnable et « impraticable », soutient-il, d’encourager la survie d’un système de contrats qui demande aux travailleurs de servir un État en guerre et de payer leurs frais de soins et de subsistance. La charge qui échoit aux femmes noires chaque fois qu’un ancien esclave s’enrôle dans l’armée rend le mandat abolitionniste du militaire encore plus rebutant. Au Congrès, dans les législatures d’État et sur les plantations d’hommes ayant refusé de fuir à l’arrivée des troupes fédérales, les revendications de justice et d’équité rappellent que les militaires ne monopolisent pas le débat.49

Le décret de l’adjudant-général Thomas permet d’examiner la justice et les soins d’une autre perspective, soit celle des esclaves qui revendiquent la liberté dans le foyer de leur sujétion. En interdisant le va-et-vient entre la plantation et les camps de l’armée fédérale (sect. V), Thomas contribue à circonscrire les stratégies déployées par les esclaves pour combler leurs besoins et satisfaire leurs aspirations. Jeune mère « emmenée par l’armée fédérale » le 1er juin 1863, Angelina se joint à la vingtaine d’esclaves appartenant à John Houston Bills qui augmentent le nombre de réfugiés au camp de La Grange, dans le comté de Fayette, à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de Bolivar. Facilitée par le réseau ferroviaire contrôlé par les troupes de Grant, la fuite d’Angelina avec son bambin dure six semaines. Selon le journal intime de Bills, Angelina revient sur la plantation – ou auprès de lui – de plein gré, « exaspérée par la liberté et les Yankees ». Considérant que Bills a pu interpréter à sa façon le retour d’Angelina dans son journal, la voie est ouverte à d’autres explications : elle aurait pu être refoulée des camps militaires soit à cause d’un manque de ressources ou de son rétablissement grâce aux soins prodigués par les médecins de l’hôpital ou elle aurait pu décider de revenir parce qu’elle était ébranlée par une agression sexuelle ou se sentait désabusée par l’insuffisance des rations ou l’écart entre les promesses de l’émancipation et la réalité.

À ce sujet, l’historien utilise les éléments de preuve avec prudence. Un détail transmis par Bills soulève des doutes sur sa propre responsabilité. En effet, il est écrit qu’Angelina donne naissance à son deuxième garçon « neuf mois et vingt-sept jours après son retour » sur la plantation. En fait, ses engagements subséquents auprès d’elle (comme servante à son domicile), son habitude à identifier le père à la naissance d’esclaves et sa rancœur pour l’armée fédérale le trahissent aux yeux de l’historien. L’identité du père ou de l’agresseur nous intéresse toutefois moins que les actions d’Angelina après l’accouchement. Tentant de survivre en tant qu’esclave, femme et mère de deux enfants, n’ayant aucun accès direct à la justice prévôtale qui opère à quelques kilomètres de Cornucopia, lieu où se trouve l’une des plantations du vieil homme, et vivant dans un contexte de contrainte, d’aspiration et d’obligation, elle inflige à un « petit garçon » non apparenté une « raclée sans pitié » qui porte atteinte à l’autorité de Bills et le pousse à la semoncer. Indignée par l’ultimatum du planteur justicier, Angelina devient « si bruyante et insultante », note Bills dans son journal, qu’il est « obligé de la corriger pour la première fois ». Le silence des sources sur l’état d’esprit d’une femme à qui la justice sur les plantations impose la peine du fouet pour une transgression disciplinaire un an après une possible agression sexuelle conduit d’ordinaire l’historien sur la voie de la culture de la dissimulation. Avant de s’y précipiter et de conclure à une absence de connaissances, il est nécessaire de relire le journal de Bills pour contextualiser l’expérience d’une esclave qui exerce et subit la violence physique. Au moment où se croisent le pouvoir d’Angelina comme adulte sur l’enfant et celui du maître sur sa personne, les revendications de justice sont déjà si tonitruantes qu’elles exposent des fragments de la vie privée. À cet égard, Angelina fait partie des esclaves jugés improductifs et « paresseux » qui contrarient Bills depuis plus d’un an. Si le ralentissement de son rythme de travail traduit une résistance impersonnelle à l’esclavage, sa participation à cette pratique populaire exprime aussi l’indignation soutenue d’une victime de sévices arbitraires. Sur une plantation située au cœur des viviers d’émancipation de Jackson, au nord, et de Grand Junction et La Grange, au sud, il est difficile d’ignorer comment les esclaves, en restant à distance de cette effervescence, utilisent le travail pour exprimer leur opposition aux abus de pouvoir comme un instrument de justice réparatrice.50

Bills voit l’initiative de ses esclaves comme un désaveu de son pouvoir et, dans sa version déformée des faits, comme le trait naturel d’individus insouciants, ingrats et malhonnêtes. Depuis les premiers bouleversements engendrés par l’occupation militaire en 1862, il rabâche que ses « serviteurs ne travaillent pas beaucoup », « ne font peu ou rien », qu’ils sont « paresseux », qu’ils « doivent faire mieux ou se rendre aux Yankees » et qu’une mère « préfère perdre un enfant que de se donner la peine de l’élever ». Il est logique d’entretenir des doutes sur la perspicacité d’un homme qui, le 1er janvier 1863, s’étonne que ses esclaves « ne réalisent pas qu’ils sont libres suivant la proclamation de Lincoln », qui juge intelligente une esclave donnant naissance à un enfant deux mois après son mariage et trois mois avant sa fuite, qui se méprend en prenant l’intérêt pour de l’attachement, et qui n’assume aucune responsabilité pour le démantèlement de l’esclavage. Aveuglé par ses pertes matérielles et l’érosion de son autorité paternaliste en 1864, Bills ne voit qu’obscurité dans l’avenir, notamment parce que l’exploitation de ses plantations doit cesser si l’ « échec est égal à celui du passé ». La découverte tardive que des esprits pragmatiques travaillent sur ses terres prolonge la durée de son affliction.51

Le 9 janvier 1865, Bills paie son dû à deux couples d’esclaves. À la pesée du coton récolté et égrené par Dave, Martha, Nathan et Harriet, il note qu’il leur doit respectivement 230,55 $ et 213,90 $ pour une production totale d’environ 1 350 kilogrammes. Comme l’acquittement ne prévoit aucune déduction pour le vêtement, la nourriture, le logis et les soins, le gain des « serviteurs » est net un mois avant l’abolition constitutionnelle de l’esclavage au Tennessee, soit le 22 février. Les six balles de coton transigées par ces quatre esclaves représentent la moitié de ce qui est récolté par tous les autres et que Bills vend à Memphis. Malgré le fait que la production de 1864 (13 balles) est trois fois supérieure à celle de 1863 (4 balles), Bills termine l’année bien en deçà de ses prévisions de 100 balles. Les sources empêchent de comprendre pourquoi l’esclavagiste offre des termes différents aux deux couples pour leur travail en 1864. N’ayant pas suffisamment d’indices que le paiement est un partage de profits, nous concluons que les deux hommes et les deux femmes sont des exploitants locataires comme ceux qui transigent avec les intendants fédéraux pour un droit d’accès aux terres abandonnées, à la différence qu’ils sont tous à la fois employeurs et employés. Deux mois avant le règlement de janvier, Bills constate déjà que Dave et Nathan « réussissent mieux que leur maître ». Confronté à cette anomalie, Bills « ne chasse pas ses esclaves de la plantation après les récoltes pour ne pas avoir à s’occuper d’eux pendant l’hiver ». Il attend la fin de l’année pour ajuster les termes des contrats offerts à une quarantaine d’esclaves pour l’exploitation des terres en 1865. Les esclaves de Bills qui l’ont abandonné ou qui ont choisi de demeurer sur ses terres affirment non seulement que l’État possède des alliés pour prendre soin de la santé des Noirs, mais aussi que la justice s’exerce au-delà du cadre des attributions du fonctionnaire.52 Avant que le gouvernement n’ouvre aux Noirs de nouvelles voies pour obtenir réparation, la famille régule les revendications de justice et le desserrement des contrôles sur ses membres.

L’étude des contrats de travail (141) signés au Tennessee, en Arkansas et au Mississippi par les planteurs (127) et les affranchis (757) en vue des récoltes de l’année 1865 prouve la place centrale de la famille noire dans le processus d’émancipation. En effet, les données sur les signataires appartenant à une unité familiale (638/757) révèlent que la santé des affranchis se négocie largement par l’entremise des figures d’autorité. Les hommes (73) et les femmes (51) à la tête des 141 contrats sont les mandataires d’affranchis, et non les commissaires du capital foncier. Transigeant avec les militaires, les civils et les planteurs depuis l’occupation du Tennessee en 1862 et l’introduction des contrats de travail en 1863, ces signataires conçoivent leurs droits à la compensation suivant des principes élaborés par les représentants d’un État en guerre et gèrent leurs obligations à la lueur des préceptes du travail libre et des besoins de la famille. Désormais négociables, toute l’assistance médicale et les fournitures nécessaires en cas de maladie les confrontent toutefois à trois défis de taille. Le premier consiste à négocier avec des hommes blancs comme Bills qui fixent leurs engagements par rapport à des normes comptables remaniées par les leçons d’un passé récent. Le second concerne l’inexpérience des signataires dans la négociation de la valeur marchande des soins (2 $/mois) – exclue des ententes en 1863 et non négociable en 1864 – face à des médecins qui refusent le paiement à crédit. Le troisième réside dans le nombre élevé de dépendants inaptes au travail (plus de 50 000 dans la seule vallée du Mississippi) que l’État pousse vers les unités de production familiale dans la foulée de sa promotion de la liberté. Prendre soin de sa famille – comme le recommandent les commissaires de l’afic – représente ainsi un risque majeur pour le parent qui appose sa marque sur un contrat de travail sans moyens pour atténuer la vulnérabilité de chacun et les effets aggravants d’aléas politiques.53

Tableau 3 – Vivres et soins offerts aux affranchis dans les contrats de travail (1865)*

Période

Vivres

Soins

Vivres et soins

Affranchis

N

%

N

%

N

%

N

%

1er janv. - 29 mai

113

95,0

107

90,0

107

90,0

119

15,7

30 mai - 31 déc.

574

90,0

327

51,3

317

49,7

638

84,3

Total

687

90,8

434

57,3

424

56,0

757

100

* Pour les sources, voir le tableau 1. Les données exposent la négociation des contrats entre les affranchis et les employeurs. Les valeurs sont conservatrices, car les vivres excluent les deux autres composantes de la subsistance, soit l’hébergement et le chauffage. En ce qui concerne les vêtements, nous avons préféré exclure cette forme de rémunération de la catégorie de la subsistance en raison de la rareté de l’offre.

Parmi les 141 contrats que nous avons réunis pour l’année de production 1865, seulement dix-huit sont paraphés avant le 29 mai, date à laquelle le président Johnson rend publique une politique d’amnistie qui permet à plus de 13 000 Confédérés de recouvrer leurs droits de propriété en moins d’un an. Les autres contrats (123) sont ratifiés principalement en septembre (98) par 84 p. 100 des affranchis recensés dans les archives (638/757). Ces précisions sont importantes pour identifier les stades du processus d’émancipation et questionner la facilité avec laquelle les propriétaires terriens transfèrent les charges médicales dans leurs transactions scellées par l’État. Nos données montrent, par exemple, que la rémunération garantit les vivres dans neuf cas sur dix (687/757), que trois affranchis sur cinq ont une couverture pour les frais médicaux à la signature des ententes (434/757) et que toutes ces valeurs chutent lorsque Johnson commence à approuver – à hauteur de deux sur trois – les demandes de pardon (voir le tableau 3). Sachant que l’empressement est l’un des pièges du devoir d’interprétation, nous choisissons d’examiner les plaintes portées à l’attention du Bureau des affranchis dans son chef-lieu de Memphis dès juillet 1865 et de jumeler leurs données aux renseignements recueillis dans les contrats de travail. À la conclusion de cette démarche, il ressort que les droits et les obligations conférés par les contrats ne sont ni des abstractions légales d’intérêt marginal ni des repères statiques sur une ligne du temps. Les revendications de droits consignées dans les dossiers judiciaires avant et après la signature des contrats confirment que la vigilance des Noirs s’exerce à l’égard des soins, de la subsistance et de la protection physique des leurs. Rappelant que l’indolence des affranchis est un mythe, les plaintes permettent aussi d’établir que le rapport des Noirs, des employeurs et de l’État avec la justice militaire annonce les débats sur la citoyenneté.54

À 1 000 kilomètres au nord-ouest de Savannah, Thomas M. Brown, un planteur du comté de Fayette, au Tennessee, obtient le droit d’embaucher Minerva McRee. Une veuve de la Caroline du Nord lui confirme ce droit par acte de rétrocession le jour où le général Sherman transmet son décret sur les terres abandonnées le 16 janvier 1865. Enceinte de deux mois, Minerva se fait alors promettre un traitement « humain » dans le cadre de son travail, une « quantité usuelle de vêtement » et des soins prodigués « au besoin » par un médecin. La veuve acquiert pour sa part le droit sur des pièces d’or d’une valeur de 80 $. Ces dispositions sur la compensation laissent croire que l’entente appartient à une époque très différente de celle sous l’ordre de Sherman, ou à une société demeurée en marge du système de contrats depuis deux ans. Il y a en effet un écart immense entre la personne qui promet aux Noirs un accès à la propriété foncière et l’autre qui exhibe sa munificence par une paire de chaussures. Un mois avant l’abolition de l’esclavage au Tennessee, l’écart est prononcé à un point tel qu’on pourrait croire qu’au 35e degré de latitude nord, sur toute la longitude séparant Morganton, en Caroline du Nord, et Oakland, au Tennessee, le temps s’est arrêté en 1860.55

Le fait que les résidants transigent avec le travail d’autrui comme à l’ère de l’esclavage – deux semaines avant l’adoption par le Congrès du treizième amendement et trois mois avant la reddition des Confédérés de Lee à Appomattox – ne déroute pas l’historien, notamment celui qui examine une juridiction comme le Tennessee où l’esclavage est demeuré légal jusqu’au 22 février 1865. Ces initiatives réussissent toutefois à confondre les représentants du pouvoir fédéral aussi tardivement qu’en septembre 1865. Dans une correspondance avec le quartier général du commissaire adjoint du Bureau des affranchis au Tennessee, par exemple, le surintendant adjoint de Murfreesboro « demande très respectueusement à être informé sur le point suivant. La liberté pour les Noirs dans ce pays a-t-elle embrassé 1864 ou n’a-t-elle eu lieu qu’en février 1865 ? » Au dire de cet agent « médusé » par un jugement rendu par une cour, « [si l’émancipation] n’a pas eu lieu l’année dernière, alors je suis coupable de mauvaise administration, car depuis le début de mes fonctions ici, j’ai ordonné le paiement des réclamations sur les contrats aux personnes de couleur l’année dernière, mais sans remonter plus loin que janvier 1864 ».56

Seuls ou avec leurs alliés, les Noirs revendiquent la justice dans le contexte de cette confusion embarrassante comme ils ont réclamé la liberté, les soins, la subsistance et la protection physique depuis le début de la guerre dans les camps de l’armée fédérale ou au service de ses régiments. Quelques jours avant l’accouchement de la jeune Minerva, Brown l’abandonne avec son jeune enfant, sans aucune explication, à l’entrée de la propriété d’Ephraim E. Greenlee – un parent de la veuve McRee. Rassuré par la présence rapprochée d’officiers du Bureau des affranchis à Memphis, Greenlee dépose une plainte contre Brown. L’action est cautionnée par le général Davis Tillson le 8 août, lequel enjoint à Brown d’honorer ses engagements d’employeur auprès de la jeune femme et de sa progéniture. Après la naissance de son deuxième enfant en moins de trois ans, Minerva trouve du réconfort dans un jugement qui lui garantit un revenu de 80 $. En contrepartie, l’obligation de payer les soins signifie pour elle et les siens l’intégration à un réseau d’entraide, le recours ponctuel à des traitements inspirés de la médecine populaire non scientifique, le tourment périodique de douleurs inapaisées ou l’enlisement dans le dédale de l’indigence. En l’absence de caution qui transfère à l’employeur une partie de la responsabilité financière pour la sécurité physique de Minerva, on peut saisir pourquoi les tribunaux militaires nouvellement constitués sapent la confiance des affranchis envers l’État. Cependant, une analyse plus large démontre que les planteurs ragaillardis par les premières indulgences de ces cours de justice se fourvoient en imaginant qu’elles leur seront dues à perpétuité.57

Dans son édition du 20 août 1865, le Nashville Daily Union partage en première page une scène du tribunal des affranchis avec ses lecteurs afin de les éclairer sur la « nouvelle façon d’obtenir justice ». La cause implique un résidant du comté de Giles, au sud de Nashville à la frontière de l’Alabama, poursuivi par deux affranchis pour refus de payer les salaires promis au début de l’année. Dans cette région du Tennessee qui donne naissance au Ku Klux Klan un an plus tard, là où les « hommes blancs » sont stupéfaits d’« apprendre que les hommes noirs ont des droits » qu’ils sont tenus de respecter, 40 p. 100 de la population trouve refuge dans l’antre de la magistrature militaire avant que la ratification du treizième amendement soit complétée et certifiée. Enjoint par le commissaire adjoint du Bureau des affranchis, le général de brigade Clinton B. Fisk, de se présenter au tribunal pour l’audience, l’agriculteur concerné s’y rend sous la contrainte d’un mandat d’arrêt et sous l’escorte de comparses. Surpris par la procédure et l’identité des plaignants, deux « voisins » noirs lui ayant appartenu durant la période de l’esclavage, le vieil homme accepte toutefois la véracité de leurs doléances et le verdict de Fisk. La dette payée, le différend résolu, il se résigne à parapher une entente écrite pour « le futur », comme ses milliers de semblables qui maudissent en passant les tribunaux militaires habilités depuis juin à neutraliser leur mépris de la liberté.58

Graphique 1 – Plaintes et disputes contractuelles à Memphis (juillet 1865–juin 1866)*

* Pour la source, voir fbtfo, T142, microfilm 24, cbfc, vol. 169–172.

En dépit de leur entrée tardive dans le processus d’émancipation, les tribunaux militaires inspirent la foi en la justice à l’aube de la production de 1866, notamment parce que le droit de poursuite et l’arbitrage des agents du Bureau des affranchis sécurisent au préalable les transactions entre employeurs et travailleurs. Sur les 3 003 plaintes enregistrées à Memphis entre le 24 juillet 1865 et le 2 juin 1866, quatre griefs sur cinq (T=2 384) sont déposés et jugés avant la fin du mois de février 1866 et plus de la moitié (T=1 533), avant la certification du treizième amendement. En possession de pareils résultats, l’historien du social réitère que les orientations de la Reconstruction prennent forme sur le terrain avant les débats sur la citoyenneté de la première session du 39e Congrès. Autres renseignements peu banals : plus d’un grief sur dix est expressément lié à une dispute contractuelle (T=392) dont la moitié se règle avant le 1er janvier 1866 (T=202). Il serait erroné ici de voir le lien entre la plainte et le contrat de travail comme trop modeste pour élever les tribunaux militaires dans l’étude de la Reconstruction. La raison en est simple : un différend porté à l’attention de l’agent du Bureau des affranchis que le chercheur classe par sujet n’existe pas en vase clos. À titre d’exemple, les cas de violence menacent la vie de travailleurs et le plan économique de la Reconstruction. Ils fragilisent aussi la famille noire qui dépend de chaque contribution pour joindre les deux bouts et réussir sa transition vers la liberté. Ils mettent enfin en péril le contrôle sur un corps productif et le pouvoir de reproduire le capital. En dépit des disputes de juridiction dans les cas de crimes graves, la violence faite aux affranchis interpelle les tribunaux militaires en tant que sentinelles des piliers institutionnels de l’ordre social et du progrès matériel. Pour les affranchis dont la compensation est réduite en cas d’absence causée par la maladie, ou pour les employeurs rendus vulnérables par la contraction du capital, la résolution sans violence et sans préjudice des disputes contractuelles devient vite un impératif, vu que l’arbitraire ampute la capacité à payer les comptes, y compris les frais médicaux non transférables au solde du crédit.59

La plainte déposée par un Noir au Bureau des affranchis place l’historien devant la nature hybride des obligations civiques de l’homme, de la femme, du travailleur, du parent, du conjoint et du citoyen libres, mais aussi devant l’une des sources de tension les plus profondes sur le terrain social de la Reconstruction. Pour l’affranchi, intimidé par la violence et des rumeurs l’incitant à croire qu’une contestation coûte plus cher que le bénéfice attendu d’une décision favorable, l’accès aux tribunaux militaires requiert une confiance inébranlable en soi-même et ses alliés. Malgré les obstacles posés sur le sentier de son développement, la justice sert les intérêts immédiats tant que brûle la flamme de la liberté, ce qui embête les planteurs et leurs partenaires politiques agonisant, depuis Appomattox, sous la lenteur de la démobilisation des troupes. Au moment où le Bureau des affranchis décide d’abolir les frais liés aux contrats de travail et d’instruire les affranchis sur les risques encourus par les ententes verbales avec des propriétaires fonciers qui utilisent leur « connaissance de la loi et les préjugés des tribunaux [...] pour donner une apparence de mieux au pire », les élus du Tennessee ont déjà contrecarré ce plan de libéralisation du droit et sonné le glas des poursuites civiles et criminelles reçues et jugées par les officiers.60 Nous ne soutenons pas que les droits des travailleurs soient mieux protégés par les tribunaux militaires, mais nous reconnaissons que les propriétaires fonciers du Tennessee utilisent l’espace public et leur influence en politique en réaction à des citoyens apprentis qui, à chaque action revendicatrice légitimée, menacent leur autorité, leurs valeurs et leurs intérêts après la guerre de Sécession.61

Le resserrement de la négociation des contrats

La mise en œuvre d’un idéal de relations sociales de production régi par la liberté, le droit et le marché est complétée à l’hiver 1865–1866 lorsque l’État resserre les paramètres au sein desquels se négocient les contrats et se règlent les différends. Durant cette phase transactionnelle du processus d’émancipation, l’empressement mène maintes fois à la dévaluation de l’étude historique des contrats de travail et à l’altération de l’histoire d’une juridiction impatiente de réintégrer l’Union. La dernière section de l’article propose de renverser la tendance, à la différence qu’elle s’arrête au printemps 1866, au moment où le clivage entre citoyens, observé dans les rues, replace le passé rebelle du Tennessee à l’avant-scène des tensions nationales.62

Sous l’autorité militaire, la justice se déploie de façon structurée malgré les secousses engendrées par l’émancipation et la guerre. Par la confiance qu’elle inspire, la justice mène aux contrats. Pour des anciens esclavagistes comme Francis G. McGavock, certainement l’homme le plus riche du comté riverain de Mississippi, en Arkansas, et probablement de l’État à cette époque, les motivations sont différentes. Le 24 août 1865, à Memphis, il soumet pour approbation les termes d’un contrat rédigé la veille dans l’espoir de combler une partie de ses besoins en main-d’œuvre. En souscrivant au transfert de 47 affranchis sur les plantations du richissime médecin, le général de brigade Davis Tillson claironne son acception du marché de la liberté sur des notes similaires à celles poussées plus tôt dans l’affaire de la jeune Minerva. Il existe en effet un écart énorme entre les termes du contrat soumis par le médecin et ceux du modèle à usage courant dans le chef-lieu de Memphis que Tillson ordonne d’imprimer. Variant de trois à quinze dollars par mois selon l’âge, le sexe et la capacité productive de l’affranchi, la rémunération offerte par McGavock s’accompagne d’un ensemble de déductions pour le transport, l’inactivité et la subsistance. Dans ce dernier cas, les frais imposés sont si extrêmes qu’il devient impossible pour les Noirs de répondre aux attentes d’un officier pour qui l’accès à la propriété est réservé aux métayers ayant prouvé leur capacité à amasser du capital. Tillson concède en effet à McGavock le droit de déduire 0,50 $ par jour du salaire des affranchis, pour leurs soins médicaux, et 0,30 $ par jour de celui des travailleurs ralentis par la maladie, pour leur subsistance. À ces conditions, les Noirs embauchés pour travailler du lever au coucher du soleil sur les plantations de McGavock pendant seize mois n’ont aucune chance d’éviter l’endettement ni de sous-estimer la valeur et l’impact d’une allocation vestimentaire et d’une couverture pour les frais médicaux sur leur capacité à jouir de la liberté. Profitant de la latitude que lui offre Tillson, le médecin signe deux autres contrats avant la fin du mandat d’un officier bientôt promu au rang de commissaire adjoint pour l’État de la Géorgie, deux ententes validées à la fin du mois de septembre par son adjoint, William Gray, et une sixième, après le départ de ce dernier pour la Géorgie, signé par son remplaçant, le général de brigade Nathan A. M. Dudley. Au total, avant la fin du mois d’octobre, McGavock embauche 261 affranchis, ou si l’on préfère, libère l’État du fardeau que ces derniers représentent. Parmi ces 261 affranchis se trouvent une minorité d’adultes (116/261), presqu’autant de femmes que d’hommes (120/261), et plus d’une douzaine d’orphelins apprentis. Comme Tillson et ses remplaçants n’exigent aucune caution ni garantie pour la protection physique des travailleurs, à l’exception de celle des orphelins non rémunérés, c’est dans le resserrement des contrôles sur les employeurs que l’émancipation cesse d’être une illusion sur le marché de la liberté.63

De l’entrée en fonction du commissaire Oliver Otis Howard le 15 mai 1865 à la certification du treizième amendement, les officiers du Bureau des affranchis dirigent les activités courantes en tentant de surmonter quatre défis sur le terrain : le démantèlement des camps de réfugiés; l’attribution des terres confisquées ou abandonnées; la désignation d’intendance des chefs-lieux; et l’élaboration d’un modèle de contrat de travail. Toutes plus pressantes les unes que les autres, ces actions guident la mise en œuvre d’un plan de reconstruction économique fondé sur l’agriculture commerciale et le principe suivant lequel le gouvernement n’a pas comme mandat de « soutenir l’affranchi dans son oisiveté » ni de le menotter aux chaînes d’une nouvelle servitude. Pour des raisons d’espace, nous examinerons la quatrième priorité dans cette section de l’article.64

À l’été 1865, le commissaire Howard dote son personnel de la latitude voulue pour assurer l’exécution des contrats. Au Tennessee, sous l’intendance du commissaire adjoint Clinton Bowen Fisk, les contraintes liées à trois années d’adaptation à l’émancipation cantonnent les engagements préliminaires à des principes inviolables de bienfaisance. Parmi les obstacles, les camps de réfugiés sont certes les plus intimidants, notamment parce que leur nombre est trop élevé, et leur attraction encore trop forte, pour justifier un démantèlement précipité à l’échelle régionale. Si les soldats rebelles qui terrorisent les affranchis après la démobilisation orientent les officiers indécis vers la sagesse du sursis, les Noirs trouvant refuge auprès des armées fédérales à un rythme soutenu retardent la promotion des contrats de travail et le retour sur la plantation. En obligeant le gouvernement à maintenir l’aide fournie aux personnes vivant dans l’indigence la plus extrême à un niveau comparable à celui enregistré pendant la guerre, la violence ralentit autant qu’elle circonscrit les rapprochements souhaités entre employeurs et employés sur le marché de la liberté. Durant les mois d’août et de septembre, par exemple, c’est plus de 150 000 rations que le Bureau offre aux affranchis du Kentucky et du Tennessee. De telles circonstances rendent intolérable l’expulsion des personnes âgées et handicapées de leur domicile par les anciens esclavagistes, ce que comprennent des officiers qui prohibent ces pratiques. Les décrets qui donnent aux employeurs le droit d’ajuster la rémunération offerte aux travailleurs selon le nombre de dépendants pris en charge sur les plantations exposent les brèches du paradoxe de la liberté présenté en introduction.65

Dans une lettre circulaire datée du 24 juillet 1865, le commissaire adjoint Clinton B. Fisk énumère les règles prescrites pour l’administration du Bureau des affranchis au Kentucky, au Tennessee et dans le nord de l’Alabama. Rendues publiques par la presse locale, les mesures sur le « travail rémunéré » indiquent que tous les efforts seront déployés pour soutenir l’autonomie des affranchis. Tempérant les craintes des anciens esclavagistes qui ont en aversion le principe de la rémunération et la liberté qu’ont les Noirs de choisir leur employeur, Fisk précise que la collaboration des planteurs est aussi déterminante pour le succès de son plan que la ratification et l’inviolabilité de « contrats équitables ». Une lecture même partielle de la presse confère qu’il sème quelques parcelles de sa vision républicaine sous de tristes auspices.66

Dans la mosaïque d’opinions intéressées, on trouve celles des éditeurs du Clarksville Chronicle, journal du nord-ouest de Nashville, à la frontière du Kentucky. Dans leur édition du 1er septembre, ils présentent les affranchis comme étant un obstacle au projet d’émancipation et à la relance économique du Sud. Aveuglé par la liberté, écrit-on, l’affranchi ne travaille que pour sa seule subsistance. Pour le Chronicle, l’affranchi « s’engage sans réflexion et abandonne son contrat sans scrupule. Il n’a pas encore pris connaissance des conditions de son nouvel état de vie et présume qu’il sera soigné comme il l’a toujours été ». Indolent de nature et « irréfléchi dans sa disposition », l’affranchi « ne travaillera que sous l’incitation de peines et de pénalités », car la richesse n’exerce sur lui « aucun attrait qui puisse égaler le luxe d’une sieste stupide sous un soleil de plomb ». Méprisant les affranchis autant que le plan de Fisk rendu public un mois plus tôt, le journal propose son propre système d’incitatifs.67

Inspiré du modèle de contrat préparé par le lieutenant-colonel H. G. Davis, surintendant du Bureau des affranchis à Clarksville, le modèle de contrat présenté par le Chronicle fixe le début de la journée de travail à la « levée de table » du propriétaire, souscrit à la déduction salariale pour le temps perdu à flâner, pour toute désobéissance ou tout congé prohibé, et accepte le prolongement des tâches en cas d’intempéries sur la base d’un principe simple : les dépenses de l’employeur pour la subsistance doivent être couvertes par la valeur du travail. Le coût des rations – plafonnées à six livres de lard et un picotin de farine par semaine pour chaque adulte – étant trop bas pour inclure l’accès aux pommes, pêches, melons et autres produits de la ferme, le modèle de contrat du journal instrumentalise la subsistance pour inciter l’employé à « s’acquitter de ses fonctions de manière joyeuse et volontaire ». Cette intervention dans l’espace public contrarie le commissaire adjoint Fisk. Conscient que la population du comté de Montgomery est constituée de deux parts égales de résidants noirs et blancs et que les relations sociales sont fragiles à Clarksville, là où l’hôpital des affranchis et les « camps de contrebande » exigent le déploiement régulier de compagnies du 101e régiment des troupes noires depuis la fin de la guerre, Fisk brave la tempête. Le lendemain de la publication de l’article du Chronicle, il nomme un agent spécial du Bureau pour assurer le démantèlement des camps de réfugiés dans le chef-lieu du comté. Deux semaines plus tard, il décrète la suspension « sans délai » des rations dans ces camps, démet Davis de ses fonctions et le remplace par un homme appelé à soutenir le modèle républicain de contrats avant la fin de l’année.68

Dans les comtés situés plus au sud, aux limites du creuset de l’esclavage de la vallée du Mississippi, Fisk se hâte de faire connaître le sens acceptable de ce que sont les « contrats équitables ». Avant la fin de l’été, il relaie à son personnel le modèle de contrat adopté par le commissaire du Bureau des affranchis. Dans le comté de Giles, la presse locale choisit de le reproduire dans son intégralité comme nous le faisons ici :

That_____________, of the County of _____________, State of _____________, _____________ held and firmly bound to the United States of America in the sum of _____________ Dollars, for the payment of which _____________ bind _____________ Heirs, Executors and Administrators, firmly, by the present, in this Contract. That _____________ to furnish the persons whose names are subjoined, (freed laborers,) Quarters, Fuel, substantial and healthy Rations, all necessary Medical Attendance and Supplies in case of sickness and the amount set opposite their respective names per month, during the continuation of this Contract – the laborers to be paid in full before the final disposal of the crop which is to be raised by them on _____________ plantation, in the County of _____________, State of _____________.69

Dans cette correspondance, Fisk omet de justifier l’introduction des clauses de subsistance et de soins auprès de son officier subalterne, attendu qu’elles ont intégré les contrats en usage depuis le début de l’année 1865. En revanche, il l’informe que le modèle peut être adapté aux circonstances et modifié pour répondre aux souhaits des signataires. Cela suffit pour éloigner l’État de la négociation des contrats et finaliser le délestage de ces charges idéologiquement onéreuses. En fait, les dispositions qui engagent à fournir « des quartiers, du carburant, des rations substantielles et saines, tous les soins médicaux nécessaires et des fournitures en cas de maladie » sont fixées par une transaction à laquelle l’État participe désormais comme tiers, et non à titre de premier contribuable. À ce sujet, la presse locale lève toute ambiguïté en dévoilant dans l’espace public les règles révisées sur les dépendants vulnérables. « Les parents », écrit Fisk, « doivent être informés qu’ils sont responsables de leurs enfants, et les enfants, de leurs parents âgés et décrépits, et qu’ils doivent travailler pour les soutenir, et ce fait doit être pris en considération dans les contrats. » En ce qui concerne les vieillards et les affranchis invalides sans famille et sans ressources, Fisk annonce qu’ils seront pris en charge par les autorités des comtés du Tennessee. Par ces remarques, le commissaire adjoint du Bureau des affranchis adopte deux règles dont les incidences débordent largement le transfert des coûts : il confère à la famille noire une responsabilité portée par les esclavagistes et le gouvernement avant et durant la guerre; il impose aux juridictions locales, c’est-à-dire à tous leurs contribuables, et non exclusivement aux anciens maîtres, le soin des plus vulnérables.70

L’action de Fisk fait émerger une idéologie républicaine qui jusqu’alors était réfrénée par le risque d’aliéner les détenteurs du capital. En effet, aux propriétaires terriens du Sud inquiets de l’appui politique reçu par un idéal agraire réservant 40 arpents et une mule pour la subsistance des affranchis, Fisk annonce qu’il n’y a pas lieu de craindre la confiscation par contrat de leur capital. Trois mois après les premiers décrets qui restituent les terres aux propriétaires confédérés, il fait connaître les détails d’une nouvelle intervention à cet égard. Dans une lettre circulaire de Fisk que publie le Clarksville Chronicle deux jours après la ratification du treizième amendement par la Géorgie, l’agent local avise les lecteurs du journal qu’il est dorénavant responsable de rédiger et d’autoriser les contrats de travail. Il met surtout en garde les agriculteurs récalcitrants. Les personnes concluant des ententes sans le sceau du Bureau « seront instamment arrêtées » et placées sous l’autorité du commissaire adjoint à Nashville.71 Les archives du Bureau des affranchis – sans contrats signés à Clarksville – ne permettent pas de vérifier si le message, voire la menace, éloigne ou rapproche les planteurs de l’autorité fédérale et du système de contrats. À l’échelle de l’État, en revanche, nos données prouvent que la certification du treizième amendement, accompagnée ou non de sanctions militaires, engendre une montée de la confiance et de l’intérêt pour les ententes du Bureau.

En vue de l’année de travail 1866, près d’un engagement sur cinq est ratifié avant la fin du mois de décembre 1865. À la fin de janvier, soit un mois plus tard, ce taux grimpe à 77 p. 100, et à 90 p. 100, établissant que les décisions d’embauche et de soutien de la famille sont prises près de deux mois avant la loi fédérale sur les droits civiques qui annonce la fin des tribunaux militaires au Tennessee (voir le graphique 2). Une telle convergence au sein de la société agraire coincée par la subsistance et le crédit appuie la thèse de protagonistes pragmatiques. D’une part, les affranchis n’attendent pas la mise en œuvre du plan de confiscation de Thaddeus Stevens pour subvenir à leurs besoins et prendre soin des leurs. D’autre part, les planteurs sont poussés vers les contrats de travail par le Bureau des affranchis et des créanciers qui écument leurs décisions d’affaires et érodent leur pouvoir. Au zénith de l’imprévisibilité des orientations de la Reconstruction, c’est ainsi que se déploie au Tennessee le plan de transfert du coût économique de la subsistance et des soins.72

Graphique 2 – Contrats négociés pour l’année de travail 1866

Le 18 décembre 1865, la journée où William H. Seward, secrétaire d’État, certifie la ratification du treizième amendement, Carl Schurz soumet au Congrès le bilan des observations recueillies à l’été 1865 sur l’état du Sud. Dans ce rapport d’enquête demandé par le président Johnson, Schurz établit que le planteur sudiste, prêt à placer son capital dans la reconstruction économique de la région, comprend le sens de l’adaptation au marché du travail libre. « Si l’ouvrier doit recevoir, comme en 1864, le vêtement, les chaussures, la nourriture, une demeure, le bois de chauffage, les médicaments », écrit-il, « le planteur ne pourra pas se permettre de lui verser un salaire plus élevé ».73

Au cours des deux semaines qui suivent, le salaire que John Houston Bills s’engage à verser à 21 affranchis pour l’année 1866 atteste la véracité de ce constat. Dans un premier temps, il retient les services d’Isom, un ancien esclave de 24 ans, sur sa plantation de Cornucopia en échange d’un salaire mensuel de douze dollars. Sa sœur Martha, veuve et mère de six enfants, fait aussi partie de l’entente, même si elle ne reçoit de Bills qu’un arpent de terre comme compensation. Pour ce groupe de huit personnes, dont trois sont trop jeunes pour travailler, le sexagénaire accepte d’inclure l’hébergement, la nourriture et les soins médicaux. En revanche, les dépenses vestimentaires – qui ont coûté 76,50 $ à Bills en 1865 pour la seule famille de Martha – sont désormais transférées aux affranchis. Dans un second temps, le vieil homme embauche Angelina comme domestique à sa résidence de Bolivar pour un salaire mensuel de six dollars sans couverture déductible pour les soins et la subsistance. Comme Martha, la jeune mère au passé tumultueux est responsable de payer ses vêtements et ceux de ses deux garçons, âgés respectivement de trois et un an, ce qui équivaut à une dépense anticipée de vingt dollars représentant un tiers de son traitement annuel. De retour à son domicile en cette journée « chaude » pour la saison, Bills ne consigne pas les transactions ratifiées dans la colonne des « horrible[s] nouvelle[s] ». Deux jours plus tard, il choisit pourtant de se libérer du modèle de contrat qui fixe à 532 $ le coût de garantie des ententes. Dans sa proposition manuscrite qu’il soumet à l’agent local du Bureau des affranchis, Bills prive une famille de la couverture contractuelle pour les soins et la subsistance – à l’exception de deux jeunes qu’il place à sa résidence – et impose aux sept membres en âge de travailler des conditions strictes sur les absences, l’usage des instruments aratoires et l’élevage des volailles et autres animaux de la ferme. Il compense ces sacrifices en cédant aux affranchis un tiers des profits de la récolte de coton et de maïs. Dans son quatrième et dernier contrat paraphé par le Bureau des affranchis le 5 janvier 1866, Bills embauche un jeune affranchi ayant appartenu à son beau-frère et partenaire d’affaires, Ezechiel Polk McNeal, pour épauler Isom à Cornucopia. Reuben McNeal devient alors le seul affranchi sous la direction de Bills en 1866 dont la rémunération annuelle (100 $), les soins et la subsistance sont bonifiés par deux habits pour l’été, un pour l’hiver et une paire de chaussures.74

L’offre de Bills à l’hiver 1865–1866, voire sa gestion récente des esclaves devenus affranchis, est inadéquate : elle ne suffit pas à retenir plus de la moitié de la main-d’œuvre ayant complété l’année 1865 sur ses terres. Le 6 janvier 1866, il évalue à 50 le nombre de Noirs ayant quitté ses plantations de Bonnie Blue, Hickory Valley et Cornucopia depuis la fin de décembre. Nous avons retracé les affranchis identifiés par Bills (33/50) dans des contrats de travail avec six autres planteurs du même comté (Hardeman). Cet exode de courte distance est essentiellement celui des familles. Les plus nombreuses – celles de Granderson, Andrew et Thomas – totalisent 25 personnes. Leurs membres sont liés par contrats pour un tiers, une demie ou la totalité de la récolte, et reçoivent le droit de cultiver une partie de la terre pour leur subsistance. Le sens de cette contestation silencieuse échappe à Bills, lequel ne comprend toujours pas que les Noirs « batifolent… brûlent des rails de clôture et dansent » pour trois raisons en cette fin d’année : ils célèbrent la certification du treizième amendement, leurs parts de la vente des récoltes et la chance de vivre au sein de leur propre famille en veillant à leur manière sur la santé de ceux et celles qui la constituent. Le vieil homme constate néanmoins que la perte de plus de 80 esclaves en moins de quatre ans sonne le glas de son autorité paternaliste et de ses ambitions matérielles. Le départ d’un si grand nombre de ses Noirs met fin à trois décennies de croissance d’une fortune qui sera léguée à ses enfants blancs et d’une influence locale qui sera représentée un siècle plus tard dans le patrimoine architectural. Cette perte de main d’œuvre explique la « mélancolie » de parents, d’amis et de partenaires d’affaires incapables d’envisager un horizon politique où les Blancs du Sud révoquent, pendant des mois et des années, le privilège d’émancipation de quatre millions d’individus et déforment l’héritage de l’engagement civique de ces derniers. Elle invite enfin les historiens à nuancer l’influence historique des Black Codes.75

Les homologues de Bills – à Chattanooga (Hamilton), Dyersburg (Dyer), Lebanon (Wilson), Memphis (Shelby), Somerville (Fayette), Springfield (Robertson), Trenton (Gibson) et dans les comtés de l’Arkansas, de la Géorgie, du Kentucky, de l’Alabama et du Mississippi qui bordent le Tennessee – se trouvent eux aussi à la croisée des chemins quant à des décisions qui révèlent des contraintes et des possibilités de la liberté, du droit et du marché. Leur décision qui permet de fixer l’engagement contractuel pour la subsistance et les soins rend publique la façon dont ils envisagent, dans l’immédiat, la mise en œuvre d’une « loi qui libère les Noirs et les maîtres du même coup ». Possédant le pouvoir de modifier la proposition contractuelle du Bureau des affranchis, les propriétaires terriens font chuter la couverture pour les soins et la subsistance de 96 à 29 p. cent au terme d’une négociation charnière de la Reconstruction (voir le tableau 4). Leur rejet des clauses médicales à l’hiver 1865–1866 s’inscrit dans une longue tradition d’opposition à la confiscation du capital et éclaire les moyens que leur offre la liberté pour reprendre le contrôle sur des affranchis dépourvus de capital. Il expose aussi un pragmatisme qui fragilise la thèse du paternalisme décrit par les historiens de l’esclavage. En effet, nos résultats révèlent que le planteur ayant assumé la charge des soins et de la subsistance de la main-d’œuvre servile avant Appomattox ne montre aucun attachement après la guerre pour la condition de ce qui fut jadis sa propriété, son devoir et la source de son statut. En tant que manœuvre singulière dans le marché de la liberté, l’empressement des propriétaires terriens à transférer à la famille noire la charge financière des soins et de la subsistance se classe dans les actions prévisibles. Il s’agit maintenant de tirer avantage de la mesure de ce phénomène pour enrichir l’étude du chapitre de la Reconstruction sur la citoyenneté – comme les initiatives de l’État, exposées ici, servent l’histoire, certes de manière incomplète, d’un idéal et d’un système de négociation et d’arbitrage.76

TABLEAU 4 – Affranchis et couverture négociée pour les soins et la subsistance, 1866*

Couverture

Avant négociation

Après négociation

Imprimés

%

Imprimés

%

Manuscrits

%

T

%

Soins

6 082

96,4

3 247

51,5

1 366

19,6

4 613

34,7

Subsistance

6 292

99,7

5 576

88,4

2 044

29,3

7 620

57,3

Soins et subsistance

6 073

96,3

3 180

50,4

675

9,7

3 855

29,0

Aucune couverture

6

0,1

54

1,0

1 634

23,4

1 688

12,7

Total d’affranchis

6 308

6 308

6 980

13 288

* La subsistance inclut les vivres, l’hébergement et le chauffage. Comme nous avons exclu les vêtements (rarement offerts) de la catégorie de la subsistance, les valeurs indiquées sont relativement conservatrices. Pour les sources, voir le tableau 1.

Conclusion

Au Tennessee, les victoires de l’armée fédérale et l’occupation militaire accélèrent l’érosion de la relation maître-esclave dès 1862. L’alliance intéressée de l’État et de ses militaires avec les esclaves en fuite permet d’élever les soins, la subsistance et la protection physique au rang des priorités du temps de guerre. Le système de contrats de travail qui émerge de ces bouleversements se développe à Washington comme sur le terrain, et ce, bien avant la création du Bureau des affranchis le 3 mars 1865. À la sortie de la guerre de Sécession, l’histoire du développement du système de contrats dévoile déjà deux faits interreliés. D’abord, les intérêts des Noirs, de l’État et des employeurs sont assujettis à la liberté, au droit et au marché. Ensuite, la négociation et l’arbitrage prennent une longueur d’avance en tant que piliers de la reconstruction économique. Sur ce plan, nous excluons volontairement de notre étude les décideurs du projet qui réclament au nom des affranchis le transfert discrétionnaire de 40 arpents et une mule. L’idée soutenue par des historiens comme Gerald David Jaynes que l’idéal de l’agriculture de subsistance s’écroulerait sous l’appui mondial à l’agriculture commerciale nous amène à examiner les contrats de travail sous un autre angle pour comprendre les initiatives des alliés du marché. En établissant que la santé des affranchis doit se négocier et que les disputes doivent se régler suivant la procédure légale régulière, nous situons aussi à un temps précis le processus par lequel l’État se débarrasse d’un legs du passé rendu insupportable, soit le paternalisme de la relation maître-esclave pour adhérer à une acception stricte de la liberté.

La présente étude nous permet de contribuer de trois façons, et ce, de manière importante, à l’historiographie. Premièrement, en invitant les chercheurs à repenser le devoir de méthode et l’importance des contrats de travail dans l’étude historique de la Reconstruction. Deuxièmement, en libérant la notion de santé des affranchis d’une approche médico-politique qui sous-estime la phase transactionnelle amorçant la rupture initiale de la relation maître-esclave. Troisièmement, en plaçant la famille noire au centre du processus d’émancipation et de production au sein duquel elle exprime ses aspirations, défend ses intérêts et exerce son pouvoir. Enfin, mais de façon complémentaire, par cette étude, nous souhaitons inviter les chercheurs à recentrer l’examen historique des débats sur la citoyenneté autour des contrats, de la santé des affranchis et du processus transactionnel qui se conclut au printemps 1866. Avant d’écrire d’autres chapitres sur ces longues péripéties, nous conclurons l’article en expliquant pourquoi nous sommes allés dans ce sens.

La santé des affranchis transigée par contrat fait partie des coûts de production qui sont portés au solde du budget de l’État durant la guerre et à celui des comptes des employeurs offrant la couverture pour les soins et la subsistance après le conflit. Dans les cas d’employeurs qui refusent d’inclure les soins et la subsistance dans la rémunération des employés ou des tenanciers, la charge devient une responsabilité des travailleurs et des familles. À ce carrefour du processus d’émancipation, l’historien dispose de deux options. La première alternative conduit au dédale des considérations matérielles. La seconde ouvre les portes sur l’étude historique des débats politiques sur la citoyenneté. Du point de vue des propriétaires terriens et des affranchis qui signent des contrats de travail, la deuxième option est la plus stimulante, car le droit de négocier la santé des affranchis menace l’ordre social s’il n’est pas contrecarré sur le plan politique.

Un affranchi à qui un employeur refuse la couverture pour les soins et la subsistance a quand même la possibilité d’obtenir cette protection s’il possède et exerce le droit de vote à l’aube de la liberté. Ayant saisi les implications économiques et sociales de l’émancipation politique et de la participation des affranchis dans les affaires publiques, la législature du Tennessee a choisi d’intervenir d’au moins trois façons : en reconnaissant aux Noirs un minimum de droits au début de l’année 1866; en hâtant le vote de ratification du quatorzième amendement; et en refusant de donner son appui au quinzième amendement. Au moment où le Parti républicain amorce son implantation dans les anciens États confédérés, le Tennessee a déjà réduit les probabilités de succès de projets politiques inspirés des dispositions négociées par contrats. La guerre à la dépendance menée pendant trois ans dans les camps militaires auprès des esclaves en fuite donne en fait l’assurance à ses législateurs qu’ils ne sont pas les seuls ou les premiers à combattre l’idée du droit à la santé. Conscients des incidences des asymétries de pouvoir, ils poursuivent résolument le combat. En reprenant le contrôle sur leur système de justice et en immunisant l’élite agraire contre de nouvelles formes de confiscation politique du capital, les législateurs du Tennessee donnent à la question des soins pour la famille émancipée une orientation qui annonce moins le « recul de la Reconstruction » que la naissance d’une nation.77

Ce projet a été rendu possible grâce à l’aide financière du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, de la Fondation Fulbright Canada et de l’Université de Moncton. Le travail des assistantes et assistants de recherche s’est avéré tout aussi inestimable. Je remercie notamment Gilles Arsenault, Lise Cormier, Andrée Christine Godin, Luc LeBlanc, Isabelle Maillet, Carolynn McNally, Michel Richard, Benoît Rouleau et Jacques Savoie. Merci à Joan Sangster et Kirk Niergarth d’avoir ouvert toutes grandes les portes de la revue. Pour leur lecture sérieuse des versions préliminaires du texte, je lève mon chapeau aux évaluatrices et évaluateurs anonymes de Labour/Le Travail, à Marielle Tremblay ainsi qu’à ma collègue Marise Bachand. Enfin, pour son appui indéfectible et ses commentaires avisés, je souhaite remercier la regrettée Johanne Dégarie.


1. Les clauses de subsistance et de soins se trouvent dans les contrats de travail que proposent les militaires aux anciens esclaves et aux propriétaires fonciers avant et après la création du Bureau des affranchis. À l’hiver 1865–1866, les clauses de subsistance incluent l’hébergement (« quarters »), le carburant (« fuel ») et des rations substantielles et saines (« substantial and healthy rations »). Les clauses de soins incluent tous les soins médicaux et les fournitures nécessaires en cas de maladie (« all necessary medical attendance and supplies in case of sickness »). Pour un exemple de contrat dans lequel sont insérées ces dispositions entrant dans la négociation de la rémunération, voir National Archives and Records Administration (ci-après nara), Records of the Assistant Commissioner for the State of Tennessee, Bureau of Refugees, Freedmen, and Abandoned Lands, 1865–1869 (ci-après tnfb), Record Group (rg) 105, M999, microfilm 21, cadre 2121, John H. Bills et Reuben McNeal, 5 janvier 1866. Dorénavant, nous citerons ce type de référence en utilisant le sigle tnfb suivi des indications pertinentes pour retrouver l’information. Dans ce cas-ci : tnfb, rg 105, M999, microfilm 21, cadre 2121. Sur le Bureau des affranchis, voir Paul A. Cimbala et Randall M. Miller, dir., The Freedmen’s Bureau and Reconstruction: Reconsiderations (New York : Fordham University Press, 1999).

2. Le modèle de rémunération est paternaliste, car il redonne à l’employeur le contrôle sur la subsistance et les soins des employés après leur émancipation. Pour examiner ce contrôle à l’époque de l’esclavage, voir Robert W. Fogel, Without Consent or Contract: The Rise and Fall of American Slavery (New York : W. W. Norton, 1994 [1989]); Eugene D. Genovese, Roll, Jordan, Roll: The World the Slaves Made (New York : Pantheon Books, 1974 [1972]); Roger L. Ransom et Richard Sutch, One Kind of Freedom: The Economic Consequences of Emancipation, Second Edition (New York : Cambridge University Press, 2001); Todd L. Savitt, Race and Medicine in Nineteenth-and Early-Twentieth-Century America (Kent : Kent State University Press, 2007).

3. Sur la redistribution des terres aux affranchis, voir Edward Magdol, A Right to the Land: Essays on the Freedmen’s Community (Westport : Greenwood Press, 1977); Claude F. Oubre, Forty Acres and a Mule: The Freedmen’s Bureau and Black Land Ownership (Baton Rouge : Louisiana State University Press, 1978). Sur l’accès à la propriété dans des juridictions précises, voir Robert Tracy McKenzie, One South or Many? Plantation Belt and Upcountry in the Civil War-Era Tennessee (New York : Cambridge University Press, 1994); Peter Kolchin, First Freedom: The Responses of Alabama’s Blacks to Emancipation and Reconstruction (Westport : Greenwood Press, 1972). De façon générale, voir Dylan C. Penningroth, The Claims of Kinfolk: African American Property and Community in the Nineteenth-Century South (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2002); Loren Schweninger, Black Property Owners in the South, 1790–1915 (Urbana : University of Illinois Press, 1990).

4. Sur l’émancipation et la Reconstruction, voir Frederick Cooper, Thomas C. Holt et Rebecca J. Scott, Beyond Slavery: Explorations of Race, Labor, and Citizenship in Postemancipation Societies (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2000); William Edward Burghardt Du Bois, Black Reconstruction in America, 1860–1880 (New York : The Free Press, 1998 [1935]); Stanley L. Engerman, dir., Terms of Labor: Slavery, Serfdom, and Free Labor (Stanford : Stanford University Press, 1999); Eric Foner, Reconstruction: America’s Unfinished Revolution, 1863–1877 (New York : Harper & Row, 1988); Leon F. Litwack, Been in the Storm So Long: The Aftermath of Slavery (New York : Vintage Books, 1979); Kate Masur, An Example for All the Land: Emancipation and the Struggle Over Equality in Washington, D.C. (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2010); James Oakes, Freedom National: The Destruction of Slavery in the United States, 1861–1865 (New York : W. W. Norton & Co., 2014 [2013]); Michael Vorenberg, Final Freedom: The Civil War, the Abolition of Slavery, and the Thirteenth Amendment (New York : Cambridge University Press, 2001).

5. Pour la citation, voir Catherine Clinton, « Reconstructing Freedwomen » dans Catherine Clinton et Nina Silber, dir., Divided Houses: Gender and the Civil War (New York : Oxford University Press, 1992), 315–316.

6. Chandra Manning, Troubled Refuge: Struggling for Freedom in the Civil War (New York : Vintage Books, 2017 [2016]); Amy Murrell Taylor, Embattled Freedom: Journeys through the Civil War’s Slave Refugee Camps (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2018).

7. L’influence exercée par W. E. B. Du Bois et le Freedom and Southern Society Project auprès des historiens de l’émancipation est incontestable, tout comme la nature imparfaite des orientations thématiques, documentaires et méthodologiques qu’ils ont proposées. À ce sujet, voir Du Bois, Black Reconstruction in America; Ira Berlin et al., dir., Freedom: A Documentary History of Emancipation, 1861–1867. Series I, Volume III: The Wartime Genesis of Free Labor: The Lower South (New York : Cambridge University Press, 1990) (ci-après Berlin, Freedom, I.III : page); Ira Berlin et al., Freedom: A Documentary History of Emancipation, 1861–1867. Series I, Volume II: The Wartime Genesis of Free Labor: The Upper South (New York : Cambridge University Press, 1993) (ci-après, Berlin, Freedom, I.II : page); Steven Hahn et al., dir., Freedom: A Documentary History of Emancipation, 1861–1867. Series 3, Volume 1: Land and Labor, 1865 (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2008) (ci-après Hahn, Freedom, III.I). Les conclusions sur l’idéologie du travail libre nous invitent à une réflexion similaire. Voir Eric Foner, Free Soil, Free Labor, Free Men: The Ideology of the Republican Party before the Civil War (New York : Oxford University Press, 1995 [1970]).

8. Sur le renouveau dans l’historiographie de la Reconstruction, voir Bruce E. Baker et Brian Kelly, dir., After Slavery: Race, Labor, and Citizenship in the Reconstruction South (Gainesville : University Press of Florida, 2014 [2013]); David W. Blight et Jim Downs, dir., Beyond Freedom: Disrupting the History of Emancipation (Athens : University of Georgia Press, 2017); Thomas J. Brown, dir., Reconstructions: New Perspectives on the Postbellum United States (New York : Oxford University Press, 2006); Gregory P. Downs et Kate Masur, dir., The World the Civil War Made (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2015); John David Smith, dir., Interpreting American History: Reconstruction (Kent : Kent State University Press, 2016). Voir aussi le numéro spécial du Journal of the Civil War Era, 7, n1 (mars 2017).

9. Sur le droit, voir Mary Farmer-Kaiser, Freedwomen and the Freedmen’s Bureau: Race, Gender, and Public Policy in the Age of Emancipation (New York : Fordham University Press, 2010), 141–166; Donald G. Nieman, To Set the Law in Motion: The Freedmen’s Bureau and the Legal Rights of Blacks, 1865–1868 (Millwood : kto Press, 1979); Penningroth, The Claims of Kinfolk, 111–130. Sur les voies de l’émancipation, voir Joseph P. Reidy, Illusions of Emancipation: The Pursuit of Freedom and Equality in the Twilight of Slavery (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2020).

10. Pour une réflexion stimulante sur le paternalisme, voir Manisha Sinha, « Eugene D. Genovese: The Mind of a Marxist Conservative », Radical History Review, n88 (hiver 2004), 4–29. Voir aussi James L. Roark, Masters without Slaves: Southern Planters in the Civil War and Reconstruction (New York : W. W. Norton & Co., 1977).

11. Jim Downs, Sick from Freedom: African-American Illness and Suffering during the Civil War and Reconstruction (New York : Oxford University Press, 2012), 42–64; Gretchen Long, Doctoring Freedom: The Politics of African American Medical Care in Slavery and Emancipation (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2012); Darlene Clark Hine, « Rape and the Inner Lives of Black Women in the Middle West: Preliminary Thoughts on the Culture of Dissemblance », Signs, 14, n4 (été 1989), 912–920; William Cohen, At Freedom’s Edge: Black Mobility and the Southern White Quest for Racial Control, 1861–1915 (Baton Rouge : Louisiana State University Press, 1991).

12. Pour la première citation, voir Eugene D. Genovese, « The Medical and Insurance Costs of Slaveholding in the Cotton Belt », Journal of Negro History, 45, n3 (juillet 1960), 141. Pour la deuxième citation, voir Kevin Lander et Jonathan Pritchett, « When to Care: The Economic Rationale of Slavery Health Care Provision », Social Science History, 33, n2 (été 2009), 155. Pour la troisième citation, voir Savitt, Race and Medicine, 62. Voir aussi Sharla M. Fett, Working Cures: Healing, Health, and Power on Southern Slave Plantations (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2000).

13. Pour la citation, voir Roark, Masters without Slaves, 145; Joseph P. Reidy, From Slavery to Agrarian Capitalism in the Cotton Plantation South: Central Georgia, 1800–1880 (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 1992), 140.

14. C’est en appliquant à l’examen des contrats de travail la distinction entre la médecine palliative et préventive – distinction soulignée par Savitt – qu’il devient possible d’élever la santé des affranchis dans l’étude du processus d’émancipation et de distinguer le rôle de l’État durant chacune des phases transactionnelles. Voir, entre autres, Todd L. Savitt, « The Georgia Freedmen’s Bureau and the Organization of Health Care, 1865–66 » dans Savitt, Race and Medicine, 101–124, 382–385. Pour des études dont l’objet est la santé et le rôle, voire la responsabilité, de l’État, voir Downs, Sick from Freedom, 69–70, 201 (notes 23–25); Randy Finley, « In War’s Wake: Health Care and Arkansas Freedmen, 1863–1868 », Arkansas Historical Quarterly, 51, n2 (été 1992), 135–163; Gaines M. Foster, « The Limitations of Federal Health Care for Freedmen, 1862–1868 », Journal of Southern History, 48, n3 (août 1982), 349–372; Gail S. Hasson, « Health and Welfare of Freedmen in Reconstruction Alabama », Alabama Review, 35 (avril 1982), 94–110; Marshall Scott Legan, « Disease and the Freedmen in Mississippi during Reconstruction », Journal of the History of Medicine and Allied Sciences, 28 (juillet 1973), 257–267; J. Thomas Mai, « A 19th Century Medical Care Program for Blacks: The Case of the Freedmen’s Bureau », Anthropological Quarterly, 46, no 3 (juillet 1973), 160–171; Reggie L. Pearson, « ‘There Are Many Sick, Feeble, and Suffering Freedmen’: The Freedmen’s Bureau’s Health-Care Activities during Reconstruction in North Carolina, 1865–1868 », North Carolina Historical Review, 79, n2 (avril 2002), 141–181; Alan Raphael, « Health and Social Welfare of Kentucky Black People, 1865–1870 », Societas, 2 (printemps 1972), 143–157. Comme antidote à la thèse de l’échec, voir Michael W. Fitzgerald, « Reconstruction Politics and the Politics of Reconstruction » dans Brown, Reconstructions, 91–116; Brooks D. Simpson, « Mission Impossible: Reconstruction Policy Reconsidered », Journal of the Civil War Era, 6, n1 (mars 2016), 85–102.

15. Jim Downs, « Structural Violence: The Humanitarian Crisis before the Memphis Massacre » dans Beverly Greene Bond et Susan Eva O’Donovan, dir., Remembering the Memphis Massacre: An American Story (Athens : University of Georgia Press, 2020), 75–83; Lee J. Alston et Joseph P. Ferrie, Southern Paternalism and the American Welfare State: Economics, Politics, and Institutions in the South, 1865–1965 (New York : Cambridge University Press, 1999). Gretchen Long établit un lien entre les contrats de travail et la santé des affranchis, mais l’absence d’informations sur les planteurs et le marché, comme le fait que l’analyse des contrats ne soit pas rigoureuse, limite les bénéfices de sa réflexion, somme toute fort intéressante. Voir Long, Doctoring Freedom, 70–89. Pour un modèle d’examen méthodologique des sources, voir Tiya Miles, All That She Carried: The Journey of Ashley’s Sack, a Black Family Keepsake (New York : Ransom House, 2021).

16. Sur la famille noire, voir Ira Berlin et Leslie S. Rowland, dir., Families and Freedom: A Documentary History of African-American Kinship in the Civil War Era (New York : The New Press, 1997); Wilma Dunaway, The African-American Family in Slavery and Emancipation (New York : Cambridge University Press, 2003); Katherine M. Franke, « Becoming a Citizen: Reconstruction Era Regulation of African American Marriages », Yale Journal of Law and Humanities, 11 (été 1999), 251–308; Herbert G. Gutman, The Black Family in Slavery and Freedom, 1750–1925 (New York : Vintage Books, 1976); Tera W. Hunter, Bound in Wedlock: Slave and Free Black Marriage in the Nineteenth Century (Cambridge : Harvard University Press, 2017); Miles, All That She Carried; Penningroth, The Claims of Kinfolk.

17. Pour les citations, voir Hine, « Rape and the Inner Lives of Black Women », 913, 915, 920.

18. Pour la citation sur la féminité, voir Deborah Gray White, Ar’n’t I a Woman? Female Slaves in the Plantation South (New York : W. W. Norton, 1999 [1985]), 12. Pour la citation sur le pouvoir, voir Leslie A. Schwalm, A Hard Fight for We: Women’s Transition from Slavery to Freedom in South Carolina (Urbana : University of Illinois Press, 1997), 3. Voir aussi Elsa Barkley Brown, « Negotiating and Transforming the Public Sphere: African American Political Life in the Transition from Slavery to Freedom », Public Culture, 7, n1 (automne 1994), 107–146; Laura F. Edwards, Gendered Strife and Confusion: The Political Culture of Reconstruction (Urbana : University of Illinois Press, 1997); Farmer-Kaiser, Freedwomen and the Freedmen’s Bureau; Noralee Frankel, Freedom’s Women: Black Women and Families in Civil War Era Mississippi (Bloomington : Indiana University Press, 1999); Thavolia Glymph, The Women’s Fight: The Civil War’s Battles for Home, Freedom, and Nation (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2020); Susan E. O’Donovan, Becoming Free in the Cotton South (Cambridge : Harvard University Press, 2007); Hannah Rosen, Terror in the Heart of Freedom: Citizenship, Sexual Violence, and the Meaning of Race in the Postemancipation South (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 2009).

19. Pour la citation, voir White, Ar’n’t I a Woman?, 24.

20. Pour la citation, voir Glymph, The Women’s Fight, 223.

21. Bénédicte Zimmermann, « Pas d’émancipation sans domination : une dialectique du pouvoir » dans Denis Thouard et Bénédicte Zimmermann, dir., Simmel, le parti-pris du tiers (Paris : CNRS, 2017), 155–185. Voir aussi White, Ar’n’t I a Woman?, 24; Hine, « Rape and the Inner Lives of Black Women »; Kate Masur, « “A Rare Phenomenon of Philological Vegetation”: The Word “Contraband” and the Meanings of Emancipation in the United States », Journal of American History, 93, n4 (mars 2007), 1057, 1060.

22. Pour un aperçu des études qui traitent les contrats de travail de façon sommaire, voir Robert Higgs, Competition and Coercion: Blacks in the American Economy, 1865–1914 (New York : Cambridge University Press, 1977); Long, Doctoring Freedom; Joseph D. Reid, Jr., « Sharecropping as an Understandable Market Response: The Post-Bellum South », Journal of Economic History, 33, n1 (mars 1973), 106–130; Ralph Shlomowitz, « The Origins of Southern Sharecropping », Agricultural History, 53, n3 (juillet 1979), 564; Shlomowitz, « “Bound” or “Free”? Black Labor in Cotton and Sugarcane Farming, 1865–1880 », Journal of Southern History, 50, n4 (novembre 1984), 569–596; Jonathan M. Wiener, « Planter-Merchant Conflict in Reconstruction Alabama », Past and Present, n68 (août 1975), 73–94; Wiener, « Planter Persistence and Social Change: Alabama, 1850–1870 », Journal of Interdisciplinary History, 7, n2 (automne 1976), 235–260; Wiener, « Class Structure and Economic Development in the American South, 1865–1955 », American Historical Review, 84, no 4 (octobre 1979), 970–992; Wiener, Social Origins of the New South: Alabama, 1860–1885 (Baton Rouge : Louisiana State University Press, 1981 [1978]).

23. Gerald David Jaynes, Branches Without Roots: Genesis of the Black Working Class in the American South, 1862–1882 (New York : Oxford University Press, 1986), 317.

24. Les conclusions de Jaynes s’appuient sur « une analyse et la codification de milliers de contrats de travail originaux » disponibles dans les archives du Bureau des affranchis (rg 105). Voir Jaynes, Branches Without Roots, 45 (note 31), 318 (tableau A.1). Pour l’État du Tennessee, les résultats de Jaynes proviennent du fonds T142. Voir nara, Selected Records of the Tennessee Field Office of the Bureau of Refugees, Freedmen, and Abandoned Lands, 1865–1872 (ci-après fbtfo), rg 105, T142, microfilms 65–72. L’absence de précisions à ce sujet nous étonne, puisque la collection regroupant les contrats du Bureau des affranchis couvre deux fonds pour cet État, soit les contrats reproduits dans les séries M999 et T142. En dépit du fait que notre dépouillement complet confirme que la deuxième série (T142) offre une copie presque conforme des contrats disponibles dans la première série (M999), Jaynes ne justifie pas sa préférence. Pour les références au fonds T142, voir les pages suivantes de son ouvrage : 51, 70 (note 29), 111–112 (notes 19, 20), 173 (note 24), 176 (notes 31–32), 179 (note 37), 181 (note 44), 187 (note 53), 201 (note 24), 203 (note 25), 205 (note 28), 211 (note 41), 215 (note 47), 312 (note 18).

25. Comme les historiens ont omis l’examen des clauses sur la santé dans les contrats de travail, nous pourrions mettre un bémol sur la négligence de Jaynes. Il est toutefois difficile de justifier pareille indulgence auprès du seul chercheur ayant lu plus de 4 000 contrats. Sur l’importance de la période qui va de la proclamation d’émancipation au treizième amendement, voir John C. Rodrigue, « “Thank God That the Tyrants Rod Has Been Broken”: The Abolition of Slavery in Tennessee » dans Bond et O’Donovan, Remembering the Memphis Massacre, 62.

26. Sur les contrats de travail, voir aussi Julie Saville, The Work of Reconstruction: From Slave to Wage Laborer in South Carolina, 1860–1870 (New York : Cambridge University Press, 1994), 111; James D. Schmidt, « A Full-Fledged Government of Men: Freedmen’s Bureau Labor Policy in South Carolina, 1865–1868 » dans Cimbala et Miller, The Freedmen’s Bureau and Reconstruction, 219–260; Amy Dru Stanley, From Bondage to Contract: Wage Labor, Marriage, and the Market in the Age of Slave Emancipation (New York : Cambridge University Press, 1998); Robert J. Steinfeld, Coercion, Contract, and Free Labor in the Nineteenth Century (New York : Cambridge University Press, 2001); Mary Turner, dir., From Chattel Slaves to Wage Slaves: The Dynamics of Labour Bargaining in the Americas (Bloomington : Indiana University Press, 1995). Voir aussi Penningroth, The Claims of Kinfolk.

27. Pour les documents consultés dans The War of the Rebellion: A Compilation of the Official Records of the Union and Confederate Armies, nous donnerons la référence en utilisant l’acronyme connu or suivi d’une séquence numérique qui comprend la série, le volume, le chapitre et la page (par exemple, or, 1.7.17: 121).

28. Pour un aperçu des études historiques sur la Reconstruction au Tennessee, y compris celles qui s’inscrivent dans la mouvance de l’École Dunning, voir Thomas B. Alexander, Political Reconstruction in Tennessee (New York : Russell & Russell, 1968 [1950]); Stephen V. Ash, Middle Tennessee Society Transformed, 1860–1870: War and Peace in the Upper South (Baton Rouge : Louisiana State University Press, 1988); Ash, When the Yankees Came: Conflict and Chaos in the Occupied South, 1861–1865 (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 1999); John Cimprich, Slavery’s End in Tennessee, 1861–1865 (University [AL] : University of Alabama Press, 1985); E. Merton Coulter, William G. Brownlow: Fighting Parson of the Southern Highlands (Knoxville : University of Tennessee Press, 1999 [1937]); Walter T. Durham, Reluctant Partners: Nashville and the Union, July 1, 1863 to June 30, 1865 (Nashville : Tennessee Historical Society, 1987); Durham, Rebellion Revisited: A History of Sumner County, Tennessee from 1861 to 1870 (Franklin : Hillsboro Press, 1999); Noel C. Fisher, War at Every Door: Partisan Politics and Guerrilla Violence in East Tennessee, 1860–1869 (Chapel Hill : University of North Carolina Press, 1997); Junko Isono Kato, From Slavery to Freedom in Tennessee, 1860–1870, thèse de doctorat. Columbia University, 2008; Peter Maslowski, Treason Must Be Made Odious: Military Occupation and Wartime Reconstruction in Nashville, Tennessee, 1862–1865 (Millwood : kto Press, 1978); McKenzie, One South or Many?; James Welch Patton, Unionism and Reconstruction in Tennessee, 1860–1869 (Gloucester : P. Smith, 1966 [1934]); Ben H. Severance, Tennessee’s Radical Army: The State Guard and Its Role in Reconstruction, 1867–1869 (Knoxville : University of Tennessee Press, 2005).

29. Pour la citation, voir le Bolivar Bulletin, 6 janvier 1866, 2; Foner, Free Soil, Free Labor, Free Men, xxxiii–xxxvi.

30. Pour la citation, voir or, 1.7.17: 121, lettre de U. S. Grant à H. W. Halleck, 28 janvier 1862. Pour les autres informations, voir or, 1.7.17: 122–124, lettre de A. H. Foote à Halleck, 7 février 1862; or, 1.7.17: 159–160, lettre de U. S. Grant à G. W. Cullum, 16 février 1862; Tennessee State Library and Archives, MF 126, Dossier Journal de John Nick Barker 1843–1868, 13–16 février 1862.

31. Pour connaître les impressions d’un planteur sur l’horrible nouvelle qu’est la capitulation des forts Henry et Donelson, voir The Wilson Library, University of North Carolina at Chapel Hill, Southern Historical Collection, registre 22, no 2245, Journal de John Houston Bills (ci-après Journal de Bills), 7–16 février, 3–10 juin 1862. Voir aussi or, 1.7.17: 424, lettre de Thomas A. Scott à E. M. Stanton, 25 février 1862; or, 1.7.17: 425, lettre de D. C. Buell à George B. McClellan, 26 février 1862; or, 1.10.22.1: 108–111, lettre de U. S. Grant à H. W. Halleck, 7–9 avril 1862; or 1.10.22.2: 423, lettre de S. B. Maxey à George Williamson, 16 avril 1862; or, 1.10.22.1: 906, lettre de Wm. K. Strong à Halleck, 8 juin 1862. Pour la citation sur la guerre totale, voir James M. McPherson, Battle Cry of Freedom : The Civil War Era (New York : Oxford University Press, 1988), 414.

32. Pour les citations, voir Journal de Bills, 1er janvier 1860, 8 juin–7 août 1862. Voir aussi or 2.1: 778, Ordre général no 3 de Halleck, 20 novembre 1861; An Act to confiscate property used for insurrectionary purposes, U.S. Statutes at Large 12, 37e Congrès, 1ère session, ch. 60, section principale 1861, p. 319; An Act to make an additional article of war, U.S. Statutes at Large 12, 37e Congrès, 2e session, ch. 40, section principale 1862, p. 354; An Act to suppress insurrection to punish treason and rebellion, to seize and confiscate the property of rebels, and for other purposes, U.S. Statutes at Large 12, 37e Congrès, 2e session, ch. 195, section principale 1862, p. 589–592; An Act to amend the act calling forth the militia to execute the laws of the Union, suppress insurrections, and repel invasions, approved February twenty-eight, seventeen hundred and ninety-five, and the acts amendatory thereof, and for other purposes, U.S. Statutes at Large 12, 37e Congrès, 2session, ch. 201, section principale 1862, p. 597–600; or, 1.7.17: 668, Ordre général n14 de Grant, 26 février 1862; Library of Congress, Ulysses S. Grant Papers. Series 5, Headquarters Records, 1861–1869, vol. 8 (suite-14 [vol. 12, 92–93 et vol. 13, 82–83], vol. 14 (suite)-16 [vol. 14, 81–82], Ordre général n72 de Grant, 11 août 1862. Disponible en ligne, sur le site www.loc.gov/item/mss233330016 pour les cadres 456–457, 606–607 et sur le site www.loc.gov/item/mss233330017 pour les cadres 39–40. Désormais, pour indiquer ce type de référence, nous utiliserons le sigle pusg-loc suivi du numéro de volume, de page et de cadre; John Eaton, Grant, Lincoln and the Freedmen: Reminiscences of the Civil War (New York : Longmans, Green & Co., 1907), 48–49; Manning, Troubled Refuge, 100, 183–185. Pour la citation sur la restauration, voir Oakes, Freedom National, 226–255.

33. Pour les citations, voir Journal de Bills, 18 août–31 octobre 1862, plus précisément les extraits relatifs aux dates suivantes : 25, 28 [sic], 29 août; 8, 10, 17 septembre; 16, 23 octobre. Voir aussi Manning, Troubled Refuge, 114–115; Richard Newman, « The Grammar of Emancipation: Putting Final Freedom in Context » dans Blight et Downs, Beyond Freedom, 11–25; Downs, « Emancipating the Evidence: The Ontology of the Freedmen’s Bureau Records » dans ibid., 160–180.

34. Pour la citation sur l’attaque/vigilance, voir or, 1.17.29.2: 297, lettre de S. A. Hurlbut à J. B. McPherson, 26 octobre 1862. Pour la citation sur les prisonniers, voir or, 1.17.29.2: 296, lettre de U. S. Grant à H. W. Halleck, 26 octobre 1862. Pour la citation sur les wagons, voir or, 1.17.29.1: 470, lettre de U. S. Grant à H. W. Halleck, 15 novembre 1862. Pour des renseignements contextuels, voir or, 1.17.29.1: 471, lettre de U. S. Grant à H. W. Halleck, 24 novembre 1862; or, 1.17.29.1: 481, lettre de U. S. Grant à H. W. Halleck, 6 janvier 1863. Pour une pression similaire sur l’autre rive du Mississippi, voir or, 1.17.29.1: 532, lettre d’Alvin P. Hovey à Fred. Steele, 6 décembre 1862.

35. Pour la citation sur les lots, voir or, 3.2: 569, lettre de J. M. Tuttle à Edwin M. Stanton, 18 septembre 1862; or, 3.2: 569, lettre d’Edwin M. Stanton à Tuttle, 18 septembre 1862; or, 3.2: 663, lettre d’Edwin M. Stanton à Tuttle, 13 octobre 1862. Pour la citation sur le désir, voir Oakes, Freedom National, 281. Voir aussi pusg-loc : 16.432.239, Ordre spécial n17 de Grant, 13 novembre 1862, consulté en ligne, www.loc.gov/item/mss233330018. Voir aussi or, 1.52.64.1: 301–302, Ordre spécial de terrain n4 de Grant, 14 novembre 1862. Pour la citation sur le secrétaire, voir or, 1.17.29.1: 470–471, lettre de H. W. Halleck à U. S. Grant, 16 novembre 1862; or, 1.17.29.1: 481, lettre de U. S. Grant à H. W. Halleck, 6 janvier 1863; Eaton, Grant, Lincoln and the Freedmen, 5, 7, 12, 14, 20; Cimprich, Slavery’s End in Tennessee, 46–59; Manning, Troubled Refuge, 97–149.

36. Pour les citations, voir Eaton, Grant, Lincoln and the Freedmen, 15, 24–28, 30. Pour les autres informations, voir Thavolia Glymph, « Black Women and Children in the Civil War: Archive Notes » dans Blight et Downs, Beyond Freedom, 121–135; Glymph, The Women’s Fight, 221–222, 236–237; Manning, Troubled Refuge; Manisha Sinha, The Slave’s Cause: A History of Abolition (New Haven : Yale University Press, 2017), 590; Emily West, Family or Freedom: People of Color in the Antebellum South (Lexington : University of Kentucky Press, 2012); Kidada E. Williams, They Left Great Marks on Me: African American Testimonies of Racial Violence from Emancipation to World War I (New York : New York University Press, 2012); or, 1.17.29.1: 481, lettre de U. S. Grant à H. W. Halleck, 6 janvier 1863; or, 1.20.32.2: 330, lettre de W. Truesdail à Rosecrans, 14 janvier 1863. Sur la « contrebande des humains », voir Masur,
« “A Rare Phenomenon of Philological Vegetation” ».

37. Pour la citation sur les gamins, voir le Daily Rebel Banner (Murfreesboro, TN), 1er janvier 1863. Voir aussi or, 1.20.32.1: 183–188, Reports of Maj. Gen. William S. Rosecrans, U.S. Army, commanding Army of the Cumberland, with congratulatory resolutions, orders, & co. Pour les données démographiques, voir Inter-University Consortium for Political and Social Research. Historical, Demographic, Economic and Social Data: The United States, 1790–1970 (fichier informatique); Inter-University Consortium for Political and Social Research, 197? (ci-après icpsr, DS0003.1860), Ann Arbor, MI. Pour la citation sur les conditions d’emploi, voir or, 1.23.35.2: 17–18, Ordre n6 de Rosecrans, 27 janvier 1863; Berlin, Freedom, I.II : 372. Pour l’information concernant le Sud-Ouest, voir or, 1.24.36.3: 65, lettre de U. S. Grant à Stephen
A. Hurlbut, 24 février 1863; or, 2.5: 279, lettre circulaire de Banks, 16 février 1863.

38. Pour les citations sur les salaires, la liberté, la loyauté, voir Abraham Lincoln, Proclamation préliminaire d’émancipation, 22 septembre 1862. Disponible en ligne : https://www.loc.gov.item.scsm000950/. Voir aussi or, 3.2: 589, lettre de L. Thomas à Meigs, 27 septembre 1862. Pour les citations sur l’insatisfaction et les retraits considérables, voir or, 3.2: 649–50, lettre de M. C. Meigs à Edwin M. Stanton, 4 octobre 1862. Voir aussi or, 3.2: 740–1, lettre de M. C. Meigs à Edwin M. Stanton, 6 novembre 1862. Pour la citation sur l’ajustement de l’offre, voir Zimmermann, « Pas d’émancipation sans domination », 178. Pour des informations contextuelles, voir or, 1.24.36.3: 156–7, lettre de H. W. Halleck à U. S. Grant, 31 mars 1863; or, 3.3: 208, lettre de Edwin M. Stanton à L. Thomas, 15 mai 1863; or, 3.3: 212, lettre de L. Thomas à E. M. Stanton, 18 mai 1863; or, 3.3: 213, lettre de Edwin M. Stanton à Thomas, 19 mai 1863; or, 3.3: 214, lettre de L. Thomas à E. M. Stanton, 20 mai 1863; or, 3.3: 769–70, lettre de L. Thomas à E. M. Stanton, 5 septembre 1863; or, 3.3: 939–40, lettre circulaire de L. Thomas, 27 octobre 1863; or, 3.3: 1044, lettre de L. Thomas à Edwin M. Stanton, 16 novembre 1863; or, 3.3: 1139, Ordre général n46 de Butler, 5 décembre 1863. Voir aussi Cimprich, Slavery’s End in Tennessee, 53 (tableau 4); Eaton, Grant, Lincoln and the Freedmen, 49–50, 58–60; Carl H. Moneyhon, « From Slave to Free Labor: The Federal Plantation Experiment in Arkansas », Arkansas Historical Quarterly, 53, n2 (été 1994), 139–40; Hahn, Freedom, III.I : 601; Glymph, The Women’s Fight, 221–250.

39. Pour la citation sur la condition de la population noire, voir or, 3.3: 73–74, lettre d’Edwin M. Stanton à Robert Dale Owen, James McKaye et Samuel G. Howe, 16 mars 1863. Voir aussi or, 3.3: 430–54, lettre de Robert Dale Owen, James McKaye et Samuel G. Howe à Edwin M. Stanton, 30 juin 1863; or, 3.4.1: 289–382, lettre de Robert Dale Owen, J. McKaye et Samuel G. Howe à Edwin M. Stanton, 15 mai 1864. Pour la citation sur ce qui est nécessaire, voir or, 3.3: 100–1, lettre d’Edwin M. Stanton à Lorenzo Thomas, 25 mars 1863. Voir aussi or, 3.3: 115, lettre de P. H. Watson à A. Johnson, 2 avril 1863; or, 3.3: 116, lettre de L. Thomas à E. M. Stanton, 4 avril 1863; or, 3.3: 117, lettre de L. Thomas à E. M. Stanton, 6 avril 1863; or, 3.3: 121, lettre de L. Thomas à E. M. Stanton, 9 et 12 avril 1863; or, 3.3: 122–123, lettre de Edwin M. Stanton à A. Johnson, 18 avril 1863. Voir aussi The American Annual Cyclopedia and Register of Important Events of the Year 1863, vol. III (New York : Appleton & Co., 1864), 425–431 (ci-après AAC 1863, suivi de la page). Sur les retards notés à l’est, voir or, 3.3: 177–178, lettre de D. Hunter à Edwin M. Stanton, 30 avril 1863.

40. Voir An Act to provide for the collection of abandoned property and for the prevention of frauds in insurrectionary districts within the United States, U. S. Statutes at Large 12, 37Congrès, 3session, ch. 120, section principale 1863, p. 820–822. Voir aussi or, 3.3: 121, lettre de L. Thomas à E. M. Stanton, 12 avril 1863; AAC 1863, 428–9; Journal de Bills, 1–9 juin 1863; or, 1.22.2: 856–7, lettre de S. S. Anderson à T. H. Holmes, 4 juin 1863; or, 1.24.2: 457–461, rapport de R. Taylor, 8 juin 1863; or, 1.24.2: 466, rapport de J. G. Walker, 10 juillet 1863; or, 1.24.3: 1049, lettre de T. B. Lamar à Jackson, 8 août 1863; or, 1.24.3: 585, Ordre général n51 de Grant, 10 août 186[3]; pusg-loc: 13.362.881, Ordre général n51 de Grant, 10 août 186[3]; or, 3.3: 710, lettre de Edwin M. Stanton à Thomas, 24 août 1863; or, 1.22.2: 578, lettre de H. W. Halleck à Banks, Grant et Steele, 28 septembre 1863; The Gilder Lehrman Collection, The Gilder Lehrman Institute of American History, lettre de James E. Yeatman à Abraham Lincoln, 6 novembre 1863. Disponible en ligne : https://www.gilderlehrman.org/collection/glc0154511; James E. Yeatman A Report on the Condition of the Freedmen of the Mississippi, Presented to the Western Sanitary Commission, December 17th, 1863 (Saint Louis : Western Sanitary Commission Room, 1864); Berlin, Freedom,I.III : 632, 634, 636.

41. Pour la citation, voir or, 3.3: 872, Ordre spécial no  331 de Townsend, 9 octobre 1863. La journée du décret de Lincoln, le secrétaire de la Guerre ordonne une mission d’inspection de la vallée du Mississippi pour relever le recrutement des troupes noires et l’intendance de la population noire ayant fui les plantations depuis le début de la guerre. Voir or, 3.3: 872, lettre de E. D. Townsend à J. S. Wadsworth, 9 octobre 1863.

42. Voir or, 3.3: 917–918, Ordre spécial n85 de Thomas, 24 octobre 1863; or, 3.3: 939–40, lettre circulaire de L. Thomas, 27 octobre 1863; or, 3.3: 1044, lettre de L. Thomas à Edwin M. Stanton, 16 novembre 1863; or, 3.4.1: 59, Ordre général n35 de Stanton, 1er février 1864. Voir aussi l’Ordre n2 de Thomas émis le 4 février 1864 dans Berlin, Freedom, I.II : 440–442. Pour le document qui comprend les règles adoptées le 7 janvier 1864 par le département du Trésor, sur la location des terres abandonnées et l’emploi des affranchis, voir William P. Mellen, Report Relative to Leasing Abandoned Plantations and Affairs of the Freed People in First Special Agency (Washington : McGill & Witherow, 11 février 1864); Moneyhon, « From Slave to Free Labor », 139–140; Eaton, Grant, Lincoln and the Freedmen, 58–60; Berlin, Freedom, I.III : 641.

43. Voir les tableaux 1 et 2. Au nord de Nashville, à Gallatin, le général de brigade Eleazar A. Paine propose un modèle de contrat qui s’apparente à celui utilisé par les militaires en 1863. L’écart s’explique par l’appui qu’il reçoit de son supérieur, l’adjudant-général Lorenzo Thomas. Pour la correspondance et le modèle de Paine, précisément la lettre du général de brigade E. A. Paine au capitaine B. H. Polk du 26 janvier 1864, voir Berlin, Freedom, I.II : 426–428. Voir aussi la lettre du major-général Lovell H. Rousseau au général de brigade W. D. Whipple du 30 janvier 1864, dans Berlin, Freedom, I.II : 429–433; la lettre de l’adjudant-général Lorenzo Thomas au major-général G. H. Thomas du 27 février 1864, dans Berlin, Freedom, I.II : 433–435. Pour le modèle de contrat proposé par un citoyen de Murfreesboro dans le comté de Rutherford, qui se trouve dans la lettre de W. Bosson au major-général Thomas du 27 janvier 1864, voir Berlin, Freedom, I.II : 435–437.

44. Voir tnfb, M999, microfilm 24, cadre 1907, contrat entre John Thompson et Lausen Anderson et al., 2 janvier 1864; voir tnfb, M999, microfilm 24, cadre 1909, contrat entre Galen J. Green et Matt et al., 28 janvier 1864; voir tnfb, M999, microfilm 24, cadre 1944, contrat entre William J. Trigg et Bill Erving et al., 25 mars 1864; voir tnfb, M999, microfilm 24, cadre 1958, attestation de Galen J. Green, 5 octobre 1864; voir tnfb, M999, microfilm 24, cadre 1962, 16 octobre 1864, reçu de William W. Trigg. Sous le département du Trésor, l’appellation ferme domestique décrit une exploitation agricole réunissant principalement des esclaves en fuite que les militaires ont exclus de l’armée et qui sont jugés moins productifs ou un fardeau excessif dans les « camps de contrebande ». À ce sujet, voir Mellen, Report Relative to Leasing Abandoned Plantations, 9.

45. Pour le contrat entre A. M. Johnson et Martha Olden et al., voir tnfb, M999, microfilm 24, cadre 1911, A. M. Johnson et Martha Olden et al., 15 février 1864; pour le contrat entre A. M. Johnson et Fanny Carter et al., voir tnfb, M999, microfilm 24, cadre 1934, A. M. Johnson et Fanny Carter et al., 17 mars 1864; pour le contrat entre J. N. Fain et Sally Fuller et al., voir tnfb, M999, microfilm 24, cadre 1938, J. N. Fain et Sally Fuller et al. Voir aussi United States House of Representatives, 38e Congrès, 1ère session (ci-après usch 38-1, R-65, page), rapport n65, 6 mai 1864; or, 3.4.1: 124, lettre de L. Thomas à Edwin M. Stanton, 20 février 1864; or, 3.4.1: 138, lettre de L. Thomas à Edwin A. Stanton, 27 février 1864; or, 3.4.1: 143, lettre de A. Lincoln à L. Thomas, 28 février 1864; or, 3.4.1: 166–170, Ordre n9 de Thomas, 11 mars 1864; or, 3.4.1: 235–36, lettre de L. Thomas à E. D. Townsend, 19 avril 1864; or, 3.5: 497, lettre de Edwin M. Stanton à Monsieur le Président Andrew Johnson, 22 novembre 1865; Journal de Bills, 14, 26 avril 1864; Moneyhon, « From Slave to Free Labor », 142; Eaton, Report of the General Superintendent of Freedmen. Sur la portée du massacre de Fort Pillow, voir Kenneth B. Moore, « Fort Pillow, Forrest, and the United States Colored Troops in 1864 » dans Carroll Van West, dir., Trial and Triumph: Essays in Tennessee’s African American History (Knoxville : University of Tennessee Press, 2002), 128–144. Sur les violences dans les comtés de l’Est, voir Fisher, War at Every Door.

46. Le décret de Thomas reprend presque intégralement les dispositions contenues dans l’ordre du général Nathaniel P. Banks pour le département du Golfe. Pour l’Ordre général no 23 de Banks émis le 3 février 1864, voir Berlin, Freedom, I.III : 512–517. Bien que les différences soient mineures, celles sur le droit méritent l’attention de l’historien.

47. Le plan du Trésor confère au surintendant des fermes le pouvoir de recevoir et de traiter les doléances des employeurs concernant les absences et la productivité (sect. XV), ou celles des travailleurs concernant les abus physiques et le déficit de subsistance (sect. XVI), mais l’initiative de Thomas remplace ces pouvoirs policiers par de nouvelles mesures. Voir Mellen, Report Relative to Leasing Abandoned Plantations, 16–17; Berlin, Freedom, I.III : 776–777, 805; or, 3.4.1: 166–170, Ordre n9 de l’adjudant-général Thomas, 11 mars 1864. Le présent paragraphe se limite aux dispositions sur les soins (point ix). Les dispositions du plan sur la rémunération, la subsistance (point xii) et la protection physique (points ix et xiii) seront traitées plus loin dans l’article.

48. Pour les citations, voir or, 3.4.1: 166–170, Ordre n9 de l’adjudant-général Thomas, 11 mars 1864.

49. Pour la citation sur la fidélité, voir or, 3.4.1: 167, sect. xii. Pour la citation sur ce qui est impraticable, voir or, 3.4.1: 166–170, 235, lettre de L. Thomas à E. D. Townsend, 19 avril 1864. Pour des raisons d’espace, nous choisissons d’ignorer les débats politiques sur l’émancipation qui divisent les Républicains et les Démocrates comme les modérés et les radicaux au pouvoir. Pour des contributions originales sur les revendications en matière de justice, voir Farmer-Kaiser, Freedwomen and the Freedmen’s Bureau, 141–166; Penningroth, The Claims of Kinfolk, 111–130.

50. Voir or, 3.4: 166, Ordre n9 de Thomas, 11 mars 1864. Pour le témoignage de Leah Black auprès de la Southern Claims Commission le 23 novembre 1871, voir Berlin, Freedom, I.III : 652. Voir ibid., 687–697, lettre de John Eaton à Jno. A. Rawlins, 29 avril 1863. Pour la citation sur ce qui est arrivé à Angelina le 1er juin 1863, voir Journal de Bills, Memoranda de 1863, 115. Pour les autres citations concernant Angelina, voir Journal de Bills, 1–9 juin 1863, 17 juillet 1863, 14 mai 1864, 31 août 1864. Les références à la performance au travail des esclaves de Bills sont trop nombreuses pour être isolées dans une note. Pour l’année 1864, les entrées les plus intéressantes sont notées dans le journal entre le 27 et le 30 août.

51. Pour l’opinion de Bills sur ses esclaves, voir Journal de Bills de 1863 pour les dates du 1er janvier, 14 février, 24 février, 14 mars, 30 avril, 18 mai, 3 juin, 29 août, 3 septembre, 24 septembre, 17 octobre; voir aussi Journal de Bills de 1864 pour les dates du 10 février, 11 février, 22 mai, 16 juin, 23 juin, 29–30 août, 14 décembre.

52. Pour les réflexions de Bills, voir Journal de Bills de 1864 pour les dates du 1er novembre, 14 et 23 décembre; voir aussi Journal de Bills, 9 janvier 1865. Pour la lettre du capitaine Ben S. Nicklin à l’honorable E. M. Stanton écrite le 13 octobre 1864, voir Berlin, Freedom, I.II : 449. Voir aussi Berlin, Freedom, I.III : 636.

53. Voir les tableaux 1 et 2. Voir aussi fbtfo, T142, microfilm 7, lettre de A. C. Swartzwelder à J. H. Van Deman, 19 décembre 1865; or, 3.4.1: 368–382, rapport final de l’American Freedmen’s Inquiry Commission to the Secretary of War, 15 mai 1864; or, 3.5: 523, 527, 533, lettre de E. M. Stanton à Monsieur le Président; The Nashville Daily Union, 30 mai 1865, 4; Berlin et Rowland, Families and Freedom, 61–2, 157; Downs, Sick from Freedom, 69–70; Foner, Reconstruction, 151; Hunter, Bound in Wedlock, 233–260; Jaynes, Branches Without Roots, 24–53; Long, Doctoring Freedom, 139–154; Caitlin Rosenthal, Accounting for Slavery: Masters and Management (Cambridge : Harvard University Press, 2018), 157–186; Stanley, From Bondage to Contract, 36. Le nombre d’hommes (73) et de femmes (51) est inférieur au nombre de contrats (141), car on trouve parfois plus d’une personne désignée comme chef de famille dans une même entente.

54. Pour la proclamation de Johnson, voir Bibliothèque du Congrès, Prest. Johnson’s Amnesty Proclamation, 29 mai 1865. Disponible en ligne : https://www.loc.gov/item/rbpe.23502500/. Pour les données sur les demandes et les pardons, voir « Ancestry.com », U.S., Confederate Applications for Presidential Pardons, 1865–1867. [Provo, UT, USA : Ancestry.com Operations Inc., 2008.]

55. Pour la cause E. E. Greenlee c. Thomas M. Brown, voir fbtfo, T142, microfilm 24, Complaint Book of the Freedmen’s Court (ci-après cbfc), 24 juillet–30 décembre, 1865, vol. 170, p. 35 [en ligne, FamilySearch.org (fs), Image Group Number (dgs) 4139899, film 1616902, image 58], E. E. Greenlee c. Thomas M. Brown, 22 août 1865 et fs-dgs 4139899, film 1616902, images 53–57, 16 janvier 1865, 8 et 18 août 1865. Voir aussi United States Census Bureau, Population Schedules of the Seventh Census of the United States, 1850 (ci-après uscs, suivi de la date), Morganton, Burke County (NC), fs-dgs 4189785, film 18108, image 4, ligne 6, Ephraim E. Greenlee; uscs 1860, Morganton, Burke County (N.C.), fs-dgs 4237116, film 803889, image 59, lignes 26–30, E. E. Greenlee; uscs 1860, Burke County (NC), fs-dgs 4237526, film 803920, image 7, lignes 16–35, E. E. Greenlee et Mary M. McRee (esclaves); uscs 1870, district 7, Fayette (TN), fs-dgs 4276869, film 553025, image 3, lignes 1–3, E. E. Greenlee; uscs 1870, Morganton, Burke County (NC), fs-dgs 4277202, film 552625, image 16, ligne 30, Mary M. McRee; uscs 1880, ed 122, District 8, Shelby County (TN), fs-dgs 5162512, film 1255278, image 3, lignes 3–4, Ephraim E. Greenlee.

56. Bobby L. Lovett, The African-American History of Nashville, Tennessee, 1780–1930 (Fayetteville : University of Arkansas Press, 1999), 47–70, 202. Pour le discours de Johnson, voir le Nashville Times and True Union, 25 octobre, 9 novembre 1864. Disponible en ligne: www.nps.gov/anjo/learn/historyculture/moses-speech.htm. Voir aussi or, 3.5: 508–9, lettre de Edwin M. Stanton à Monsieur le Président Andrew Johnson, 22 novembre 1865; Foner, Reconstruction, 183; State c. Davidson, 42 TN 184 (1865); Charles Bros. c. State, 42 TN 201 (1865); Gholson c. Blackman, 44 TN 580 (1867). Pour la citation extraite de la lettre de John Seage au lieutenant-colonel R.W. Barnard datée du 1er septembre 1865, voir Berlin, Freedom, I.II : 473.

57. Voir la note 55. Minerva ne signera pas de contrat avec Greenlee ou Brown en vue de l’année de production 1866. Voir tnfb, M999, microfilm 20, cadre 1502, contrat entre E.E. Greenlee et Shelby Greenlee et al., 1er janvier 1866. Voir ibid., microfilm 21, cadre 296, contrat entre E. E. Greenlee et Nelson Parks et al., 9 mars 1866. Pour une « vision relationnelle plus large de la santé », voir Fett, Working Cures.

58. Pour les citations, voir le journal Nashville Daily Union, 20 août 1865, 1er et 15 octobre 1865, 1. Pour les données démographiques, voir icpsr, DS0003.1860.

59. Voir le graphique 1. Aucune plainte ne porte spécifiquement sur la compensation palliative (par exemple, les soins), et seulement trois plaintes, sur les clauses préventives (par exemple, la subsistance – toutes des réclamations pour des pièces de vêtement). Voir Adam Taylor c. Henry Sales (18 novembre 1865) – cause rejetée en faveur de Sales; Mahala Blister c. William Jones (22 décembre 1865) – jugement en faveur de Blister, y compris un dédommagement de seize dollars; Minnie Thompson c. Harrison Hilliard (29 janvier 1866) – aucun jugement rendu dans cette affaire. Sur le contrôle, voir Stanley, From Bondage to Contract, 36–43.

60. Ces observations proviennent des rapports préparés par les agents locaux du Bureau des affranchis au Tennessee. Voir tnfb, M999, microfilms 16–19. Voir la lettre circulaire n11 – signée par le commissaire adjoint du Bureau des affranchis au Tennessee (J. R. Lewis) après l’adoption d’une loi (25 mai 1866) qui déclare les affranchis « témoins compétents dans toutes les cours de justice de l’État » – qui fournit de l’information sur l’abolition des tribunaux militaires et l’obligation qu’ont les agents locaux d’aviser et d’instruire « les affranchis de leurs droits et des moyens de les protéger à l’intérieur des cours civiles ». Pour les citations, voir U.S. Congress, Senate, 39Congrès, 2session, Letter of the Secretary of War, Communicating, In compliance with a resolution of the Senate of December 17, 1866, reports of the assistant commissioners of freedmen, and a synopsis of laws respecting persons of color in the late slave States (par exemple, le document n6, 21 janvier 1867, 127–30, 220–221); voir U.S. Congress, House of Representatives, 39Congrès, 2session, Report of the Commissioner of the Bureau of Refugees, Freedmen and Abandoned Lands, 1er novembre 1866 (par exemple, le document n1, Message of the President of the United States, and Accompanying Documents (1866), 747); voir United States, Report of the Commissioner of the Bureau of Refugees, Freedmen and Abandoned Lands, for the Year 1867 (Washington 1867), 69. Sur l’accès à la justice au Tennessee, y compris le retour des tribunaux civils, voir An Act to do Justice and render persons of African and Indian descent Competent Witnesses in the Courts of this State, loi adoptée le 25 janvier 1866, Tennessee Public Acts, deuxième session ajournée en 1865, ch. xviii, p. 24; An Act to amend An Act to do Justice and render persons of African and Indian descent competent witnesses in the Courts of this State, passed January 25, 1866; and also to amend an Act to repeal Sections 2728 and 2729, Article 5, Chapter 7 of the Code of Tennessee, passed January 25, 1866, loi adoptée le 25 mai 1866, ibid., ch. lvi, p. 80; An Act to Repeal Sections 2728 and 2729 Article 4, Chapter 7, of the Code of Tennessee, loi adoptée le 25 janvier 1866, ibid., ch. XVI, p. 22–23; An Act to define the term « Persons of Color », and to declare the rights of such persons, loi adoptée le 26 mai 1866, ibid., ch. xl, p. 65.

61. Les procès-verbaux du congrès tenu à Nashville du 7 au 10 août 1865 confirment que les Blancs tentent de circonscrire les options politiques des affranchis. Voir Philip S. Foner et George E. Walker, dir., Proceedings of the Black National and State Conventions, 1865–1900 (Philadelphia : Temple University Press, 1986), vol. 1, 115–127.

62. William Cohen a soutenu que les Black Codes ne gênent pas la mobilité des affranchis après la guerre de Sécession. Au Tennessee, les lois sur le vagabondage (« vagrancy ») et sur l’enrôlement (« enticement ») étant adoptés tardivement (1875), la trame des contraintes se trouve ailleurs. Avant l’abolition des tribunaux militaires et la réadmission du Tennessee au Congrès, au printemps 1866, on discerne cette trame dans le resserrement de la négociation par contrats, les plans de rémunération paternaliste et l’expérience des propriétaires terriens en gestion du capital. Voir Cohen, At Freedom’s Edge, 31; Beverly E. Forehand, Striking Resemblance: Kentucky, Tennessee, Black Codes and Readjustment, 1865–1866, thèse de maîtrise. Western Kentucky University, 1996, 31. Voir aussi Long, Doctoring Freedom, 139–154; Stanley, From Bondage to Contract, 125–7. Pour un point de vue différent, voir Foner, Reconstruction, 199–201; Wiener, Social Origins of the New South, 52–53, 58–61.

63. Pour les différents contrats, voir : tnfb, M999, microfilm 23, cadres 1126–1128, contrat entre F. G. McGavock et Jim Anderson et al., 24 août 1865; ibid., microfilm 23, cadres 1137-9, contrat entre F. G. McGavock et Doc Hart et al., 28 août 1865; ibid., microfilm 25, cadres 435-7, contrat entre F. G. McGavock et Janeth Wallace et al., 1er septembre 1865; ibid., microfilm 25, cadres 419, 433, contrat entre F. G. McGavock et George Miller et al., 27 septembre 1865; ibid., microfilm 23, cadres 1110-4, contrat entre F. G. McGavock et Jim Allen et al., 29 septembre 1865; ibid., microfilm 25, cadre 429, contrat entre F. G. McGavock et Matilda Brown et al., 28 octobre 1865. Pour Tillson, voir tnfb, M999, microfilm 16, cadre 46, sect. iv–v, Ordre spécial (ci-après O.S.) n36 de Fisk, 2 septembre 1865. Voir aussi nara, rg 105, Selected Series of Records Issued by the Commissioner of the Bureau of Refugees, Freedmen, and Abandoned Lands, 1865–1872, M742, microfilm 7 (ci-après fbrc-7), circulaires émis, index des sujets, mai 1865–juin 1869 [en ligne, fs-dgs 7675276, film 491556, image 60], lettre circulaire n16 de Howard, 19 septembre 1865; George R. Bentley, A History of the Freedmen’s Bureau (New York : Octagon Books, 1970 [1955]), 68–69; Paul A Cimbala, Under the Guardianship of the Nation: The Freedmen’s Bureau and the Reconstruction of Georgia, 1865–1870 (Athens : University of Georgia Press, 1997), 5–7, 29; Hahn, Freedom, III.I : 278, 384–6, 564 et 676.

64. Après son entrée en fonction le 15 mai 1865, Howard fait connaître les règles qui régissent l’administration du Bureau des affranchis par une série de lettres circulaires. À ce sujet, voir fbrc-7, fs-dgs 7675276, film 491556, image 51, lettre circulaire d’O. O. Howard, 15 mai 1865; ibid., image 52, lettre circulaire n2 de Howard, 19 mai 1865; ibid., image 52, circulaire n3 de Howard, 22 mai 1865; ibid., images 53–54, circulaire n5 de Howard, 30 mai 1865. Les commissaires adjoints sont nommés un mois plus tard, dont Clinton B. Fisk pour la gestion du Kentucky et du Tennessee. Voir ibid., sect. II, image 54, circulaire n6 de Howard, 13 juin 1865; ibid., sect. 2, image 56, circulaire n9 de Howard, 6 juillet 1865; ibid., image 60, circulaire no 16 de Howard, 19 septembre 1865. Sur les terres confisquées ou abandonnées, voir ibid., images 59–60, circulaire n15 de Howard, 12 septembre 1865; ibid., image 61, circulaire n20 de Howard, 28 novembre 1865.

65. Sur la latitude des commissaires adjoints, voir fbrc-7, fs-dgs 7675276, film 491556, image 57, lettre circulaire n11 de Howard, 12 juillet 1865. Sur les camps, voir Taylor, Embattled Freedom, 6, 58, 120; Manning, Troubled Refuge, 98. Sur les rations, voir U.S. Congress, House of Representatives, 39e  congrès, 1ère session (par exemple, le document n11, Message from the President of the United States Transmitting Report of the Commissioner of the Bureau of Refugees, Freedmen, and Abandoned Lands), 18 décembre 1865, 39. Sur Howard, voir William S. McFeely, Yankee Stepfather: General O. O. Howard and the Freedmen (New York : W. W. Norton & Co., 1968). Sur l’expulsion des tenanciers se trouvant sur des terres cédées par pardons à des propriétaires blancs, voir fbrc-7, fs-dgs 7675276, film 491556, image 61, lettre circulaire n20 de Howard, 28 novembre 1865.

66. Voir tnfb, M999, microfilm 16, cadres 119–121, lettre circulaire n2 de Fisk, 24 juillet 1865. Le document est reproduit dans le Clarksville Chronicle, 4 août 1865, 1. L’initiative de Fisk émane de lettres circulaires de Howard. Voir fbrc-7, fs-dgs 7675276, sect. viii, film 491556, image 54, lettre circulaire n5 de Howard, 30 mai 1865; ibid., image 57, lettre circulaire n11 de Howard, 12 juillet 1865.

67. Voir le Clarksville Chronicle, 1er septembre 1865, 2.

68. Ibid. Le recensement fédéral rapporte 9 554 esclaves et 956 Noirs libres vivant dans le comté de Montgomery en 1860 sur une population totale de 20 895. Voir icpsr, DS0003.1860. Sur les troupes et les réfugiés à Clarksville, voir tnfb, M999, microfilm 16, cadre 27, O.S. n5 de Fisk, 6 juillet 1865; ibid., cadre 28, O.S. n7 de Fisk, 8 juillet 1865; ibid., cadre 29, O.S. n8 de Fisk; ibid., cadre 30, O.S. n10 de Fisk, 18 juillet 1865; ibid., cadre 36, O.S. n22 de Fisk, 7 août 1865; ibid., sect. VI, cadre 41, O.S. n28 de Fisk, 16 août 1865. Sur le démantèlement, voir ibid., sect. viii, microfilm 16, cadre 46, O.S. n36 de Fisk, 2 septembre 1865; ibid., sect. VI et viii, microfilm 16, cadres 55-56, O.S. n45 de Fisk, 13 septembre 1865. Sur le remplacement de Davis et la nomination de Bond, voir tnfb, M999, sect. I-II, microfilm 16, cadre 59, O.S. n48 de Fisk, 16 septembre 1865; ibid., sect. viii, microfilm 16, cadre 61, O.S. n49 de Fisk, 18 septembre 1865.

69. Le contrat est reproduit dans le Nashville Daily Union, 17 septembre 1865, 2. Nous avons mis en gras les clauses de santé (subsistance et soins).

70. Voir la lettre de Clinton B. Fisk à John A. Jackson, 16 septembre 1865. Cette lettre est reproduite dans le Nashville Daily Union, 17 septembre 1865, 2. Voir aussi Foner et Walker, Proceedings of the Black National and State Conventions, 122. Voir fbrc-7, fs-dgs 7675276, film 491556, image 54, lettre circulaire n5 de Howard, 2 juin 1865. Sur l’opposition à « l’établissement d’un système national pour les pauvres », voir or, 3.5: 533, lettre d’Edwin M. Stanton à Monsieur le Président Andrew Johnson, 22 novembre 1865.

71. Voir le Memphis Daily Appeal, 9 novembre 1865, 1; tnfb, M999, microfilm 16, cadre 87; le Clarksville Weekly Chronicle, 8 décembre 1865, 2.

72. Sur le plan de Thaddeus Stevens, voir le New York Herald, 12 septembre 1865, 4; ibid., 5 décembre 1865, 4; le Elkton Cecil Whig, 23 septembre 1865; le Chicago Tribune, 7 décembre 1865, 2; ibid., 12 décembre 1865, 1; le Richmond Daily Dispatch, 20 décembre 1865, 3; le Rock Island Evening Argus, 23 décembre 1865, 2; le Memphis Daily Appeal, 26 décembre 1865, 1; Library of Congress, Congressional Globe, 39e Congrès, 1ère session, compte-rendu des débats, 18 déc. 1865, 72–75. Sur les contraintes du marché, voir Jaynes, Branches Without Roots, 35–36. Sur les droits civiques, voir An Act to protect all persons in the United States in their civil rights, and furnish the means of their vindication, U.S. Statutes at Large 14, 39Congrès, 1ère session, ch. 31, section principale 1866, p. 27–30.

73. Carl Schurz, Report on the Condition of the South (New York : Arno Press and The New York Times, 1969), 84–85. Pour le document soumis au Congrès par le président Johnson, voir U.S. Congress, Senate, 39e Congrès, 1ère session (par exemple, le document administratif n2). Pour de l’information sur Schurz, voir Hans L. Trefousse, Carl Schurz, A Biography (New York : Fordham University Press, 1998 [1982]).

74. Pour les contrats, voir tnfb, M999, microfilm 21, cadre 1428, contrat entre John H. Bills et Isom et al., 25 décembre 1865; ibid., cadre 1432, contrat entre John H. Bills et Angelina et al, 25 décembre 1865; ibid., cadres 1551–2, contrat entre John H. Bills et Coleman et al. , 27 décembre 1865; ibid., cadre 2121, contrat entre John H. Bills et Reuben McNeal, 5 janvier 1866. Voir aussi Journal de Bills, 25–27 décembre 1865.

75. Pour les contrats, voir tnfb, M999, microfilm 21, cadres 2227–9, contrat entre Martin W. Guy, William W. Guy et Andrew Bills et al., 29 décembre 1865; ibid., cadre 1999, contrat entre Wiley Higgs et Granderson Bills et al., 3 janvier 1866; ibid., microfilm 22, cadre 137, contrat entre R. S. Scott et Thomas Bills et al., 16 février 1866. Pour la citation concernant la colonne des « horribles nouvelles », voir Journal de Bills, 16 février 1862. Pour les autres citations, voir Journal de Bills, 25–29 décembre 1865; 6–8 janvier 1866. Sur les Black Codes, voir Jaynes, Branches Without Roots, 17.

76. Pour la citation sur la loi, voir Roark, Masters without Slaves, 145; Reidy, From Slavery to Agrarian Capitalism, 140. Sur le paternalisme à l’époque de l’esclavage, voir Sinha, « Eugene D. Genovese », 4–29; Genovese, Roll, Jordan, Roll. Voir aussi Edward E. Baptist, The Half Has Never Been Told: Slavery and the Making of American Capitalism (New York : Basic Books, 2014); Rosenthal, Accounting for Slavery; Calvin Schermerhorn, The Business of Slavery and the Rise of American Capitalism, 1815–1860 (New Haven : Yale University Press, 2015).

77. William Gillette, Retreat from Reconstruction, 1869–1879 (Baton Rouge : Louisiana State University Press, 1982 [1979]); Roark, Masters without Slaves, 191, 195.


How to cite:

Nelson Ouellet, « Prendre soin de la famille émancipée. La santé des affranchis et sa négociation à l’aube de la Reconstruction au Tennessee (1862–1866), » Labour/Le Travail 92 (Fall 2023): 177–227, https://doi.org/10.52975/llt.2023v92.008.